Le sucre se prépare à un avenir amer
La condamnation du régime sucrier européen laisse planer une ombre menaçante en France, ou un tiers de la production serait menacée. Évoqué depuis de nombreux mois dans l'attente d'une décision finale, le « scénario catastrophe » envisagé par les représentants du secteur sucrier français a été entériné jeudi. L'OMC a finalement considéré, après un jugement en appel, comme illégales des subventions versées par l'Union européenne à ses producteurs de sucre.
Dans son rapport, l'organe d'appel de l'OMC considère que les exportations sucrières subventionnées de l'UE ont largement excédé depuis 1995 la limite annuelle fixée à 1,273 Mt. À l'échelle européenne, la perte de débouchés serait de 5 Mt par an (soit un quart de la production totale), tandis qu'en France la CGB (Confédération générale des planteurs de betteraves) anticipe une baisse de la production de l'ordre de 30 %, ainsi que la fermeture d'un tiers des sucreries existantes. Après l'annonce de la décision de l'OMC, la Confédération paysanne a estimé vendredi que celle-ci « laisse entrevoir un scénario aussi catastrophique que celui qui se dessine pour le textile », avec le risque de voir se développer des « importations sans limites, produites dans des conditions économiques, sociales et écologiques bradées et sans normes». L'OCM sucre, peu modifiée depuis quarante ans, rémunère le sucre européen trois fois plus cher que le prix mondial, un rapport amené à diminuer progressivement. Tout comme l'Union européenne, le ministre de l'Agriculture « regrette la condamnation du régime sucrier communautaire par l'OMC et les conclusions de ce jugement», tout en exprimant « sa confiance dans la filière française ».
Le 22 juin, date-couperet?
Mais la confiance ne sera pas un facteur suffisant pour redonner le sourire aux producteurs français, premiers exportateurs de sucre en Europe. Le futur sera plus clair pour eux après le 22 juin, date à laquelle l'UE proposera une réforme de l'OCM, un an avant la fin du régime actuel. Bruxelles a affirmé tenir compte du récent jugement de l'OMC dans ses propositions, qu'il va falloir intégrer aux grandes lignes 2006-2009 annoncées l'an dernier. Ces projections devraient se traduire par la réduction du prix de soutien institutionnel de 632 à 421 e/t la tonne en deux étapes sur trois ans, ainsi qu'une diminution du quota de production communautaire (de 17,4 à 14,63 Mt sur 4 ans) sans oublier la baisse du prix minimal pour la betterave sucrière, de 43,6 à 27,4 e/t la tonne d'ici trois ans.