Le Saint Nectaire au plus près de son terroir
Le 30 mars dernier le nouveau décret comportant les conditions de production du fromage AOP Saint-Nectaire a été validé par le ministre de l’Agriculture. Avec 14 300 tonnes de fromages en 2006, (+5% par rapport à 2005), le Saint Nectaire se porte plutôt bien, en dépit des difficultés rencontrées par l’un des principaux opérateurs locaux, Toury (lire nos éditions précédentes). Le produit est le quatrième fromage AOC de vache avec près de 40 % en fromages fermiers.
Mais afin de s’imprégner encore plus de son terroir, le Saint-Nectaire vient de modifier son décret en renforçant des spécificités. « En 1992, les AOC fromagères devaient réviser leur décret, rappelle Patrice Chassard, président de l’ODG Saint Nectaire. Il nous a fallu 15 ans pour convaincre tous les opérateurs de la filière. Aujourd’hui nous avons ancré notre fromage au terroir. »La filière a accepté de renforcer des éléments essentiels du lien de la production à son terroir. « Une des grandes difficultés que nous avons eue à résoudre, c’était de convaincre d’allonger la durée d’affinage minimum du fromage, précise Bernard Blay, directeur de l’ODG Saint Nectaire. Beaucoup de producteurs ont dû agrandir leurs caves. Car pour 30 % de durée d’affinage supplémentaire, il fallait avoir la place de stocker. »
Une sélection exigeante du troupeau
Mais la durée d’affinage n’est pas la seule contrainte de la modification du décret. La filière a décidé d’aller plus loin avec la suppression totale de l’ensilage avec un taux de matière sèche supérieure à 80 %. « Arriver au fourrage sec, c’est-à-dire à la suppression de l’ensilage à la date du 31 décembre 2020, c’est une grosse contrainte pour l’ensemble de la filière », confirme Patrice Chassard. À cela, il faut ajouter la sélection du troupeau. 80 % des animaux devront être nés et avoir été élevés sur la zone au 1er janvier 2012 et même 100 % en 2015 en dehors des races à petits effectifs qui bénéficient d’une dérogation (Salers, Ferrandaise, Abondance, Simmental Française, Brune.) « Non seulement le troupeau, mais aussi les génisses doivent être nés et élevées sur la zone », confirme Patrice Chassard.
En outre, la durée de pâturage des animaux a été portée à 140 jours par an et les exploitations doivent désormais compter 90 % de prairies naturelles permanentes, avec des parcelles n’ayant jamais été semées. Autant d’efforts nécessaires pour conforter un vrai fromage d’Auvergne, complètement en osmose avec son terroir pour la plus grande satisfaction du consommateur.
Les professionnels ont rempli leurs devoirs, reste maintenant à faire passer le message. Là n’est pas le moindre effort quand, lors de dégustations au dernier salon international de l’agriculture, on a pu entendre des consommateurs croire qu’ils goûtaient « du Camembert ! » Le chemin est long et pédagogique. Mais nous touchons là à un autre problème différent des révisions du décret : celui de l’apprentissage et de l’information consommateur.