Le pigeonneau fait son nid sur les tables des fêtes
Le pigeonneau est une des volailles « festives » qui garnissent les tables de fin d’année. Sa production est confidentielle : un peu moins de 2 000 t par an La production nationale de pigeonneaux a atteint 2 060 tonnes en 2004, selon Agreste, dépassant pour la première fois les 2 000 tonnes. Les Pays de la Loire sont la première région de production avec 1 235 t. La Bretagne est la seconde avec 399 t.. Mais il intéresse la restauration et les magasins de surgelés, malgré des tarifs élevés : à Rungis, le pigeon de 400 g à 500 g vaut entre 3,50 et 4,30 € la pièce, et le pigeon de plus de 500 g entre 4,00 et 4,80 € la pièce.
L’impossibilité d’industrialiser l’élevage de pigeonneau positionne celui-ci dans le haut voire le très haut de gamme. Mais l’image prestigieuse du pigeonneau, jadis réservé aux tables de la noblesse, n’est plus le seul motif de consommation. Sa viande rouge, mais maigre, correspond aux tendances nutritionnelles actuelles. Elle est de plus rapidement cuite.
Les Charmilles, leader national, se positionne sur ce créneau gastronomique. Sur 17 millions d’€ de CA en 2004/2005 (45 % en abattage et 55 % en solutions culinaires), le groupe 60 % à l’exportation. Il affiche des références comme Georges Blanc, ou Alain Passard en volaille entière et en découpe. Ses solutions culinaires (farcis, terrines, plats cuisinés, etc) se retrouvent de Système U à Métro en passant par Auchan, Maximo et Pomona. « La croissance est régulière de 5 à 8 % par an. Il ne faut pas cantonner le pigeonneau aux seuls grands chefs, d’ou notre travail sur les produits traiteurs» souligne le dirigeant.
Les carcasses de pigeons sont d’ailleurs utilisées pour préparer les fonds de sauces. L’édition d’un livre bilingue français-anglais il y a trois ans « le pigeonneau – cuisine et terroir» et la mise en place de concours dans les écoles hôtelières, marque sa volonté de communiquer plus largement sur cette viande. Malgré la destruction de son abattoir par un incendie en 2003, le groupe a conservé ses clients, ses fournisseurs et ses 70 éleveurs – il en existe environ 500 en France. Dominique George est actionnaire majoritaire des Charmilles aux côtés de 5 éleveurs fondateurs. L’entreprise possède trois sites : celui de Maulévrier (Maine-et-Loire), racheté en 1991, celui d’Orthez et France Pigeonneau en Bretagne. « Un tel regroupement donne un ticket d’entrée sur certains marchés. Le catering aérien exige par exemple des classifications à 10 ou 15 g prêt» souligne le dirigeant. Les deux autres principaux opérateurs sont Elefa dans le Maine-et-Loire et depuis peu LDC, qui a repris à la CAM (Coopérative des agriculteurs du Morbihan) son abattoir de canards possédant une ligne d’abattage de pigeons. On peut estimer à 75 % la part de marché des trois premiers.
Des coûts de production incompressibles
La production tend à se rationaliser, malgré l’individualisme des producteurs. Les éleveurs de pigeons sont en fait aussi indépendants que passionnés. L’élevage des pigeons lui-même est à part. C’est la seule espèce à plume où le petit dépend de ses parents. « Le petit reste dans le nid et a besoin du lait de jabot, la régurgitation de ses parents » précise Jean-Luc Boyer, responsable d’Europigeon (Grimaud), seul sélectionneur français. Ce sont les parents qui consomment l’aliment fourni (céréales entières, pois, tournesol, soja et minéraux). L’investissement à réaliser est exclusif de l’espèce et pour une durée d’au moins 15 ans.
Quelques organisations de production se sont mises en place, autour des Charmilles (Association des producteurs de pigeons de l’arc Atlantique) comme autour de Elefa ; deux abattoirs qui se font face sur la zone artisanale de Maulévrier (49). Les gains de productivité envisageables en élevage portent surtout sur la facilité de nettoyage et de distribution des aliments.
Le groupe Terrena, dont plusieurs adhérents produisent des pigeonneaux, a travaillé à la révision des types de bâtiments avec le constructeur Chaboti, il y a quelques années, la prévention par le nettoyage restant le meilleur outil de la gestion des risques sanitaires. Pour le reste, chaque éleveur a tendance à conserver ses secrets. Une chose est sûre : le pigeonneau restera relativement cher, ne serait-ce que parce qu’il faut entre 7 et 8 kg d’aliment pour obtenir 1 kg de viande, quand il suffit de 3 kg chez la caille.