Le groupe Carnivor se rêve en géant de la viande
« Nous voulons être à la viande ce que Picard est au surgelé », expose Éric Pierotti, qui ne cache pas ses ambitions. Débarqué de chez ED voilà deux ans, le directeur du développement du Groupe Carnivor compte bien ériger sa société en acteur incontournable de la viande dans l’Hexagone. Ce jeune homme de 31 ans a ainsi engagé sa société dans une expansion « à marche forcée ». Depuis son arrivée, l’entreprise toulonnaise a nettement accéléré son rythme d’implantation : une quinzaine de nouveaux points de vente ont été créés, portant leur nombre à 40. Deux de plus viennent d’ouvrir leurs portes à Nice. Et la cinquantaine devrait être atteinte fin 2007. « Il s’agit de pouvoir compter 100 magasins d’ici cinq ans » avoue Éric Pierotti.
Des objectifs qui ont logiquement amené Carnivor à revoir son outil de production. Exit son site de transformation d’Arles, devenu trop exigu avec ses 2 000 m2 et ses 2 tonnes de viandes produites par jour. Une nouvelle plate-forme de 12 000 m2 et d’une capacité de 100 tonnes par jour est entrée en service cette année à Saint-Martin-de-Crau, dans les Bouches-du-Rhône. « Un investissement de 15 millions d’euros, réalisé entièrement sur fonds propres» indique Éric Pierotti. « Nous avons souhaité nous doter d’une usine au ‘top-niveau’ en terme de découpe de viande, de traçabilité et de maîtrise de la qualité » poursuit-il. Ce site regroupe 150 bouchers et permet à Carnivor de centraliser les ateliers de découpe jusqu’alors éparpillés dans chaque magasin. Une opération qui réduit les risques sanitaires et libère de la surface de vente. Totalement auto-nettoyante, cette usine est par ailleurs « surpressurisée» pour empêcher toute présence bactériologique venue de l’extérieur. A l’heure actuelle, 20 tonnes de viande sortent quotidiennement de ses 15 quais de livraison. Des marchandises livrées directement aux boutiques par sa flotte de 20 camions détenue en propre.
30 % de croissance en 2006
Éric Pierotti voit donc les choses en grand. Et les chiffres lui donnent raison. Parti de 90 millions d’euros en 2004, le chiffre d’affaires de Carnivor a passé la barre des 100 millions en 2005. Il devrait cette année atteindre 130 millions d’euros, en attendant les 150 millions pour 2007. Avec une masse salariale qui devrait passer de 600 à 650 employés d’ici l’année prochaine. Les clés de cette success-story ? « Le meilleur rapport qualité-prix du marché» avance le dirigeant. « Nous gérons toute la chaîne, de l’achat jusqu’à la vente. Charal est dans une situation similaire, sauf qu’ils ont fait le pari de la grande distribution »… avec en toute logique, « les problèmes de coût marketing et de la marge des distributeurs » que cela induit. De son côté, Carnivor repose sur un concept simple : être le seul intermédiaire « du producteur au consommateur », pour maîtriser ses marges à 100 %. La société commercialise ainsi exclusivement ses produits dans ses magasins, répartis sur le grand quart Sud-Est de la France. On y trouve en libre-service tout type de viande. 20 % de l’offre est également composée de produits laitiers frais, vendus sous marques nationales, « un héritage de la crise de la vache folle ».
Mais surtout, Carnivor va chercher 60 % de sa viande en Irlande – contre 30 % en France, 5 % en Espagne, et 5 % en Italie. Des bêtes qui arrivent sous forme de carcasses désossée sur son site provençal. « Et exclusivement de race à viande » souligne Éric Pierotti. « Le choix de la qualité » selon lui. « Dans l’Hexagone, on trouve surtout des races laitières, explique-t-il, et la viande y est vendue plus chère en raison des charges qui pèsent sur les producteurs». En Irlande, la société impose de toute façon son propre cahier des charges et y possède certains abattoirs.
Enfin, l’introduction au Marché libre de son capital en 2001 aura nettement favorisé le développement de Carnivor. Le groupe reste malgré tout contrôlé par son fondateur et actuel pdg, le Niçois René Imbert, qui en possède plus de 60 %. « Un visionnaire, qui a eu l’idée du concept, des appros à la distribution » confie son bras droit. Pour soutenir son essor, l’entreprise se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. Eric Pierotti cherche des partenaires en GMS pour une possible arrivée de la marque en linéaires. « Uniquement avec une autogestion du rayon et un contrat de long terme» précise-t-il. Un accord serait en vue pour le début de l’année prochaine. Du côté des boutiques, la question de la mise en place d’une franchise se pose pour étendre leur maillage au niveau national. Le directeur du développement tranchera fin 2007.