Le grand fossé
De plus en plus de familles sont attirées par la vie à la campagne. C’est ce que confirme l’enquête annuelle des Safer, sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural. Les prix des maisons y ont augmenté en 2004 de 14%, progressant plus rapidement dans les zones les plus isolées où ils étaient initialement moins élevés. Pourtant, il faudrait avertir les citadins qu’ils trouveront dans le monde rural une ambiance moins rose qu’ils ne l’imaginent. Car c’est peu dire que le monde agricole français vit une période de crise aiguë, dans pratiquement toutes les productions. Il sera difficile à l’exilé ou au touriste de les éviter, tant la baisse des prix se traduit par des manifestations spectaculaires et parfois violentes. A peine passé le mouvement de colère des ostréiculteurs, les viticulteurs ont manifesté en masse cette semaine, pour la deuxième fois en quelques jours, témoignant que les mesures annoncées par le ministère de l’agriculture leur semblaient insuffisantes. Mais la colère monte aussi ailleurs : dans la production avicole -les producteurs d’œufs traversent actuellement une grave crise, avec des coûts de production inférieurs à ceux du marché depuis plusieurs semaines-, chez les céréaliers ou encore les sucriers, qui n’arrivent décidément pas à digérer le démantèlement d’un système qui a longtemps assuré leur revenu. Il paraît que nos voisins s’étonnent de l’importance que revêtent ici les questions agricoles. Ils n’auront bientôt plus d’excuses. La pression immobilière sur les campagnes françaises -notamment dans le bocage de l’Ouest- est en grande partie entretenue par la demande étrangère, notamment britannique. Des urbains étrangers qui viennent y chercher une chose : la tranquillité.