Le commerce équitable mise sur le public
Les acteurs du commerce équitable fondent de gros espoirs sur les commandes publiques pour se développer en France, malgré une frilosité des collectivités locales liée notamment à une méconnaissance de la filière. « Le commerce équitable dans les commandes publiques, ça marche déjà en France, mais on mise beaucoup sur les perspectives », résume Guilhem Papelard, membre de l’association grenobloise Equi’Sol, qui organisait les 1er, 2 et 3 février le 1 er salon européen du commerce équitable à Villeurbanne (Rhône). « Les commandes publiques en France représentent 15 % du PIB, c’est un levier important qui doit aussi aider la filière à se structurer, car c’est la demande qui tire le marché », ajoute Mathilde Legon, également membre d’Equi’Sol.
Depuis 2006, le cadre légal des marchés publics est beaucoup plus favorable aux acteurs du commerce équitable, puisqu’il prévoit que soit pris en compte le développement durable. « Cette évolution n’a pas encore été bien intégrée par les collectivités locales », note toutefois M. Papelard. Pour mieux les renseigner, Equi’Sol a édité un Guide de l’achat public équitable et créé un site internet pour les collectivités (www.ofretic.com).
Le risque juridique est toujours réel. Ainsi, aux Pays-Bas, les autorités de la province de Groningue, qui avaient décidé de se fournir exclusivement en café « commerce équitable », ont été attaquées par le n° 1 batave du café, Douwe Egberts, pour pratique discriminatoire. Mais fin novembre 2007, un tribunal néerlandais a donné raison à la province de Groningue, estimant qu’il ne s’agissait pas d’une pratique anti-concurrentielle.
Jurisprudence
« Nous comptons bien utiliser ce jugement comme une jurisprudence pour rassurer toutes les institutions publiques qui craignent ce genre de poursuites partout en Europe », souligne Jochum Veerman, l’un des responsables de la communication de la Fondation Max Havelaar aux Pays-Bas. Equi’Sol propose notamment aux collectivités locales d’identifier au mieux les besoins et de s’assurer de l’adéquation entre la demande des collectivités et l’offre des réseaux équitables. Ce dernier point est l’un des freins majeurs à un véritable essor du commerce équitable dans les commandes publiques, estime Gilles Deprelle, d’Agrofair, un importateur de fruits en commerce équitable.
« Il y a beaucoup d’idées et de bonnes volontés mais les collectivités ne sautent pas toujours le pas », précise-t-il. « A Rome, il nous a été commandé des bananes bio commerce équitable pour toutes les cantines de la ville, ça représente deux conteneurs de bananes par semaine. Si Paris en faisait de même, pas de problème », affirme le responsable d’Agrofair. Des exemples existent déjà à Chambéry ou à Villeneuve d’Ascq (Nord), qui achètent du riz commerce équitable pour les cuisines de cantines.