Le CAE préconise une rupture totale de modèle agricole
Dans le concert des propositions de réforme de la PAC, certaines recommandations détonnent, à l’image de celles préconisées dans le rapport « Perspectives agricoles en France et en Europe » qui sera bientôt publié. Réalisé par le Conseil d’Analyse Economique (services du Premier ministre), le document corédigé par l’économiste Philippe Chalmin et Dominique Bureau (ministère de l’Industrie et ancien du ministère de l’Environnement) préconise d’ouvrir totalement les marchés agricoles et de rétribuer les agriculteurs pour leur rôle environnemental et d’aménagement du territoire. Le libéral Philippe Chalmin vise les céréales. « L’heure est venue de liquider tout ce qui reste de la gestion du marché au niveau bruxellois. Je suis partisan de la fin des aides, des restitutions et du gel des terres pour redonner à l’ensemble des grands marchés végétaux la totale liberté du marché » a estimé le spécialiste des matières premières. Pour autant, M. Chalmin n’appelle pas à la fin de tous les instruments actuels et souhaite « rendre les aides intelligentes », avec un cofinancement important.
Le système des DPU tourne à l’absurde
Le système des DPU, qui tourne « à l’absurde » devrait être refondu, avec chaque hectare de SAU éligible aux aides, une situation impossible aujourd’hui. En contrepartie de l’abandon des barrières douanières et autres restitutions, le rapport du CAE crée une distinction entre ce qui doit être payé par le consommateur et la rétribution pour service rendu. Cette dernière, à la charge de l’Europe, de l’Etat et de la région, permettrait de compenser tout ou partie la baisse de revenu liée à l’abandon des systèmes de régulation actuels.
Le rôle de l’agriculture apparaît également fondamental pour Dominique Bureau, directeur des affaires économiques et internationales au ministère des Transports. La mise en avant de l’aspect environnemental ou de gestion des paysages est de nature à légitimer les aides versées. Les ratés des négociations à l’OMC laissent un délai assez large pour envisager des modifications du régime de la PAC. La rupture prônée par le rapport ne touche cependant pas le secteur de l’élevage. « Ici, la logique de marché ne fonctionne pas, justifie Philippe Chalmin. Nous ne pouvons pas aller sur le marché mondial car nos prix sont trop élevés. Il faut donc maintenir les quotas, en les accrochant à la terre ». Commandé fin 2005 par le Premier ministre, ce rapport a été remis le 4 avril à Dominique Bussereau. Rien n’impose cependant les pouvoirs publics à appliquer les recommandations présentées par le CAE, d’autant que le monde agricole milite pour le maintien de la PAC jusqu’à l’échéance de 2013. « Ce que nous proposons n’est pas un désarmement agricole ! D’un strict point de vue de l’efficacité, on sera mieux sans rien (ndlr : en référence au système de gestion des marchés). Il faut clairement aller vers le cofinancement » assène Philippe Chalmin, qui se qualifie ainsi que son collègue Dominique Bureau de résolument « agro-optimiste ».