Lait : les syndicats inquiets pour le futur
Sitôt signé, sitôt critiqué. Vendredi, l’accord sur le prix du lait, dont l’encre était encore fraîche, suscitait déjà des réactions. De son côté, le ministre de l’Agriculture s’est félicité de l’issue des négociations, tout comme la FNSEA, les JA et la fédération des producteurs de lait (FNPL) qui, dans un communiqué commun ont estimé que « la détermination avait payé grâce à la très forte mobilisation des producteurs ».
Ce point de vue plutôt enthousiaste tranche singulièrement avec les positions défendues par la Confédération Paysanne et la Coordination rurale. La Confédération « dénonce vigoureusement » cet accord interprofessionnel, qui entérine finalement une baisse progressive du prix du lait de 5,92 euros/1 000 litres pour les mois d’août et de septembre, portée à 7 euros pour les trois derniers mois de l’année.
« Une victoire à la Pyrrhus »
Le syndicat agricole déplore que, malgré la volonté des producteurs de ne pas voir leurs revenus de nouveau ponctionnés (après 9 trimestres consécutifs de baisse des prix à la production), la FNPL ait choisi « de capituler en rase campagne devant l’industrie laitière ». Selon le syndicat, la baisse de revenu consécutive à la diminution du prix du lait correspond à un mois et demi du revenu annuel d’un producteur laitier. Pour la Coordination Rurale, le document signé jeudi dernier est tout simplement « un mauvais accord » et traduit « une victoire à la Pyrrhus ». « L’aide laitière directe qui sera versée à partir d’octobre (d’un montant de 12,15 euros / 1 000 litres) ne compensera jamais la lourde perte de revenu que continuent de subir les éleveurs » dénonce le syndicat. Son président François Lucas réclame que le prix du lait ne soit pas indexé sur les prix à l’exportation, mais exclusivement sur les coûts de revient à la production. « Le principe d’un prix découplé du coût de production fausse la logique. Il n’y a rien de bon à aller se contaminer sur le marché mondial, alors que les produits laitiers européens doivent être adaptés au seul marché européen ». Selon lui, la signature de l’accord a fini de refroidir les producteurs les plus ardents. La Coordination, qui estime qu’il faudrait repenser l’indice lait du CNIEL regrette l’absence en son sein des syndicats minoritaires et dénonce « une interprofession sans pluralisme syndical », en référence à l’exclusivité de la FNPL.
Les industriels de leurs côtés expliquent que, l’accord conclu jeudi dernier « donne des perspectives pour trois ans », dans la perspective d’un accord-cadre qui devrait être disponible dans les semaines à venir. De quoi préparer l’application de la réforme de la PAC dans un climat un peu plus serein que les derniers mois. « Mais la situation va être difficile. Car il existe un couple entre quotas de production et prix. C’est ce couple qui détermine le revenu et la taille des ateliers. Si vous touchez à l’une des données sans modifier l’autre, cela crée un déséquilibre. Et avec la baisse des prix d’intervention, l’impact est certain », affirme le président de la Coordination Rurale qui considère que « la réforme de la PAC n’ira pas à son terme ».