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L’agriculture tirée entre terroir et « culture d’entreprise »

Les Assises de l’agriculture organisées au Conseil économique et social le 22 novembre ont confirmé le hiatus entre la demande rêvée des consommateurs et les réalités du marché.

Le ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Dominique Bussereau, voulait que les Assises de l’agriculture donnent la parole à d’autres acteurs de la société civile que les professionnels agricoles. Aussi, une fois n’est pas coutume, les syndicats agricoles tels la FNSEA ou la Confédération paysanne n’étaient-ils pas représentés en tribune… n’en perdant pas une miette néanmoins dans la salle.

En matière de défi alimentaire, la qualité apparaît comme le point de rencontre au niveau national entre le consommateur et le producteur, et la stratégie à adopter pour sécuriser le revenu et dégager de la valeur ajoutée. Du reste, l’une des conclusions d’une étude réalisée par Ipsos en octobre 2006 en direction des consommateurs et des agriculteurs, à la demande du ministère de l’Agriculture, ne dit rien d’autre. Les consommateurs français « attendent des produits de qualité, de terroir », tracés et labellisés, a expliqué François Backman, directeur des études qualitatives chez Ipsos, tout en étant « nostalgiques de la cour de ferme de la IIIe République».

L’agriculteur, lui, dans un monde de plus en plus concurrentiel, cherche à se distinguer et s’en sortir par la qualité, tout en répondant aux exigences du consommateur.

Mais l’agriculteur se voit aussi comme un chef d’entreprise. Des « valeurs communes entre les entrepreneurs et les agriculteurs » que sont le « travail», « l’esprit d’entreprise » et le « pragmatisme» existent selon la présidente du Medef, Laurence Parisot. Invitée à introduire la journée, elle a affiché sa volonté de jeter des ponts entre les « deux mondes » de l’entreprise et de l’agriculture.

Trouble fête

Cependant, Christophe Bonduelle, président directeur général du groupe agroalimentaire du même nom, est venu jouer les troubles fêtes, en estimant qu’il serait « une erreur » pour l’agriculture européenne de faire en premier lieu de la qualité : « une offre passe d’abord par le cœur du marché, puis le haut de gamme», a-t-il argumenté. Et comme si le message restait encore inaudible, il a précisé ce qu’il essayait « de faire tous les jours » : « produire le moins cher possible pour vendre le plus cher possible». Dominique Bussereau, qui a clôturé ces Assises en prônant « un meilleur partage de la valeur ajoutée » entre les différents maillons de la filière agroalimentaire, et « un prix vraiment rémunérateur » pour les agriculteurs, devra en prendre note.

Par ailleurs, l’agriculture aura aussi pour mission de répondre à l’accroissement attendu de la demande alimentaire mondiale. En effet, les études démographiques prédisent que la planète sera peuplée de 9 milliards d’individus à l’horizon 2050, contre 6 milliards d’habitants aujourd’hui. De plus, 800 millions de personnes sont actuellement sous alimentées dans le monde. « La base productive de l’Europe reste absolument nécessaire à long terme » afin d’approvisionner en partie le monde en denrées alimentaires, a défendu par conséquent l’ancien ministre de l’Agriculture Henri Nallet.

Mais cette demande croissante conduira à une augmentation des échanges internationaux sur le marché, juge le directeur du développement durable à l’Agence nationale pour la recherche, Michel Griffon, entraînant donc « une pression forte pour une libéralisation de ce marché ». La vision de la dérégulation des marchés agricoles serait dramatique pour Henri Rouillé d’Orfeuil, président de Coordination Sud, un collectif d’ONG françaises, car « l’instabilité des prix est le cœur du moteur de la paupérisation des paysans à l’échelle mondiale », et notamment dans les pays du Sud. C’est aussi l’une des raisons du blocage des négociations à l’OMC.

Rédaction Réussir

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