La sécurité alimentaire classée parmi les risques majeurs
«La sécurité alimentaire peut apparaître comme l’un des risques majeurs du xxi e siècle », considère le Forum économique mondial. Elle est « au cœur du fonctionnement de l’économie et du bien-être de la société à l’échelle du monde ». Dans un rapport intitulé Risques planétaires 2008, l’organisation connue pour son rendez-vous à Davos passe en revue quatre facteurs émergents susceptibles de modeler les décennies à venir. On y trouve la sécurité alimentaire au même titre que le risque financier systémique. « La croissance démographique, l’évolution des styles de vie, le changement climatique et l’utilisation grandissante des cultures alimentaires pour les agrocarburants peuvent plonger le monde dans une période de prix plus volatiles et durablement élevés. De graves conséquences risquent d’en découler, particulièrement pour les communautés les plus vulnérables », considèrent les auteurs.
Selon la FAO, la sécurité alimentaire est atteinte quand toute la population, à tout moment, accède physiquement et économiquement à une alimentation suffisante, saine et nutritive, de manière à subvenir à ses besoins diététiques et à ses préférences alimentaires pour une vie active et en bonne santé. Comme la sécurité énergétique, elle ne revient pas seulement à éviter les ruptures physiques d’approvisionnement, mais aussi à assurer un approvisionnement dont le niveau prix permet une activité économique et un bien-être suffisant pour prospérer. Ses impacts sont planétaires et variés. « Le souci d’une sécurité alimentaire durable s’est récemment étendu aux pays développés », souligne le rapport. Par exemple, le Royaume-Uni a toujours compté sur l’abondance du marché mondial pour s’assurer un approvisionnement alimentaire à prix raisonnable, mais ce modèle peut être chahuté à l’avenir. En 2007, les prix des aliments et boissons ont subi leur plus fort taux de hausse en 14 ans, à 4,7 %. Une inflation du même ordre est intervenue aux Etats-Unis, en partie à cause de l’extension des surfaces consacrées au maïs éthanol. La Chine et l’Inde sont également exposées à des pressions concernant leur sécurité alimentaire et cela pourrait avoir des conséquences sur l’économie de la planète.
Instabilité politique
« Au-delà des conséquences économiques potentielles du renchérissement des denrées alimentaires, il y a la relation bien établie entre le prix de la nourriture et la stabilité politique », avancent les auteurs. En mars dernier, des milliers de Mexicains ont manifesté contre la multiplication par quatre des cours du maïs. Au mois de septembre, les Italiens ont organisé une journée de grève contre la flambée du prix des pâtes. En octobre, dans le Bengale-Occidental, des émeutes ont été provoquées par le rationnement alimentaire. Certains gouvernements sont aussi intervenus pour limiter les conséquences politiques de l’inflation des cours des denrées. Les autorités russes ont exercé un contrôle des prix des produits de première nécessité avant les élections législatives de décembre 2007. En Égypte, les subventions aux producteurs de pain ont été gonflées pour atténuer l’impact du renchérissement du blé. En Chine, les taxes sur les importations de soja ont été réduites, les subventions aux fermiers augmentées, pour stimuler la production agricole, particulièrement en porc et en lait. Le Forum économique mondial reste indécis sur la poursuite de la flambée des prix des aliments. « Les hommes politiques doivent à nouveau considérer la nourriture comme un domaine stratégique et commencer à changer leur politique alimentaire », conclut le rapport.