La Roumanie attire les sucriers français
Les français ne sont pas les plus nombreux en Roumanie. Seules quelques dizaines de sociétés françaises se sont créées en association avec des intérêts roumains dès la révolution de 1989. Pour acheter des terres, un étranger ne peut en effet investir seul dans le pays, il doit impérativement créer son entreprise avec des interlocuteurs roumains. Christophe Masson, attaché agricole à l'ambassade de France à Bucares, parle d'une soixantaine de ressortissants français qui ont tenté l'aventure agricole roumaine. Arnaud Perrein, ingénieur agronome, est arrivé quelques temps après 1989 ; il cultive aujourd'hui environ 3000 hectares, principalement des céréales « et commence à gagner de l'argent depuis trois ans parce qu'il a limité ses investissements au maximum et qu'il s'est bien intégré dans son environnement immédiat ». Benoît Mayrand, n'était pas de formation agricole quand il s'est installé à Giurgu, au sud de Bucarest. Ce marnais était informaticien de formation. Il possède aujourd'hui une étable de 450 vaches et prévoit d'investir tout prochainement dans un atelier de transformation laitière pour la production de fromages. Il devrait bénéficier des fonds européens ( les fonds Sapard).
Bien placé sur le marché du sucre de bouche
Outre les grands de la distribution (le groupe Carrefour en est à son quatrième magasin et Auchan devrait bientôt s'implanter), des entreprises agroalimentaires françaises ont tenté également l'aventure. Il y a bien sûr des groupes comme Danone ou Syngenta.
Les intérêts sucriers français sont également présents. « A l'Est, tout le monde est parti en même temps : Tchéquie, Hongrie, Pologne...le choix des administrateurs de Bazancourt s'est porté à l'époque sur la Roumanie», explique Etienne Genet, directeur des sucreries de Bourgogne et conseiller de l'équipe roumaine depuis 98 pour le compte de Cristal Union . Cristal Union possède donc à parité avec Saint-Louis Sucre la seule usine roumaine certifiée HACCP et Iso 9001 depuis 2001. L'outil industriel construit par les Allemands en 1968 est situé à Oradea, au nord-ouest du pays à la frontière hongroise. Le groupe franco-allemand pèse environ 19% du sucre roumain et se place au 2ème ou troisième rang sur le marché roumain.
« Notre situation géographique en Centre-Europe est un atout indéniable », explique Etienne Genet en poursuivant : « nous avons investi en Roumanie sur le long terme, pas sur le court terme » La sucrerie d'Oradea commercialise 70 000 tonnes de sucre dont 42 000 tonnes à partir de sucre roux en provenance du brésil et 28 000 tonnes à partir des betteraves (chiffres 2005).
La stratégie du groupe franco-allemand est claire : « Dans un marché d'environ 550 000 tonnes de sucre, où le prix du sucre est en grande partie fixé par les niveaux de prix du roux sur le marché mondial, et où l'on consomme environ 22 à 23 kg par habitant et par an, Oradea est bien placé sur le marché du sucre de bouche», explique Etienne Genet en complétant : « on peut encore assister dans les mois qui viennent à un brassage des cartes entre les huit sucreries roumaines les plus importantes !».
Oradea s'appuie sur ses parts de marché et l'image de marque de ses produits à la marque Diamant et le groupe franco-allemand en attendant 2007. Ce sera l'année de l'attribution définitive des quotas sucre et on devrait voir plus clair dans la réforme de l'OCM sucre et les négociations de l'OMC.
Entre betteraves et raffinage du sucre roux en provenance du Brésil via la mer noire, la stratégie des sucriers français s'affine. Mais ils ont une volonté affirmée : celle de vouloir donner les commandes industrielles aux Roumains le plus vite possible...tout en gardant le contrôle financier. Rendez-vous dans deux ans.