La production agricole en manque d’investissements
Livrés à eux-mêmes par leurs gouvernements, les agriculteurs n’investissent pas ou de manière sporadique. Les apports de capitaux sont lents. C’est une des raisons de la volatilité des prix en matière agricole, selon les industriels de l’agroéquipement.
La volatilité des prix agricoles mondiaux se nourrit des incertitudes de la production et la production est incertaine par manque d’investissements réguliers. C’est au creux de cette réalité qu’interviennent les équipementiers du secteur agricole, vendeurs de tracteurs, de machines agricoles, de cages ou de machines à traire. Depuis quatre ans, les équipementiers invitent des personnalités agricoles à leur sommet Agriévolution : en Italie en 2008, aux États-Unis en 2010, en France en 2011, ce sera en Inde en 2013. Au sommet de Paris, organisé par l’union sectorielle Axema pendant le Salon de l’agriculture, le vice-ministre de l’Agriculture bulgare et le secrétaire d’État slovaque ont loué la politique agricole commune (Pac). Michel Portier, fondateur et gérant d’Agritel, société française de gestion sur les marchés céréaliers, a constaté l’abandon fréquent des politiques agricoles à travers le monde. Tandis que Marion Guillou, patronne de l’Inra, a suggéré de protéger celles-ci à travers une gouvernance mondiale.
La production russe pourrait doubler
Le président de l’organisation russe des constructeurs d’agroéquipement, Konstantin Babkin, a présenté la Russie comme un marché dynamique qui a tout de même subi les impacts de la crise. Avant 2008, le taux de croissance annuel était de 45 %, il a aujourd’hui chuté mais tend à se stabiliser. Il pense que la production de céréales russe pourrait doubler ou même quadrupler d’ici à 2020.
Le marché de l’Inde a été présenté comme complexe mais particulièrement dynamique par le spécialiste de la Fédération des chambres indiennes de commerce et d’industrie, Baskar Reddy. Il a mentionné le cadre encourageant offert en Inde aux investisseurs : services aux entrepreneurs ou fonds de garantie de crédit pour les acheteurs de machines agricoles. L’investissement peut aller très vite, comme au Brésil où les ventes de tracteurs ont presque doublé entre 2004 et 2010, ainsi que l’a noté le président des équipementiers du pays. L’Europe connaît une reprise à deux vitesses, selon le président des constructeurs français, avec des risques de « surchauffe » dans les économies émergentes soutenues par des entrées de capitaux, et une certaine austérité dans la zone euro.
« Les opérateurs ne sont jamais constants », regrette Jean-Pierre Bernheim, président d’Axema, qui compare les investissements à des sauts de carpe : « Quand les prix des produits agricoles sont élevés, les achats bondissent ; suivent plusieurs années sans ». Les apports réguliers de capitaux seraient souhaitables, considère-t-il. Il donne l’exemple de l’industrie laitière française, qui « a beaucoup participé à l’investissement dans les tanks à lait et les salles de traite ».
Le fonds d’investissements Pictet Agriculture, sicav née en 2009 et cumulant 260 millions d’euros d’encours, promet de bons rendements ces prochaines années dans l’aquaculture en Asie, la canne au Brésil, ou le foncier. En termes de pays, il vise l’Inde ou la Chine, où la fourniture de moyens de production comme la mécanisation, produits de protection des cultures, les services logistiques ou de stockage, apportent forcément de la croissance.