La meunerie française, malade de sa surcapacité
Selon les estimations du dernier comité permanent de l’Onic, la meunerie française aura exporté en 2004-2005, 850 000 tonnes de farine dont 590 000 à destination des pays tiers. C’est 4,3 % de moins que pour la campagne précédente, mais c’est surtout la confirmation d’une tendance qui s’est traduite par une baisse des exportations françaises de farine de 54 % entre 1996 et 2003.
L’Onic, qui vient de publier un ouvrage exhaustif La meunerie française : analyse, perspective et stratégie, ONIC, 21 avenue Bosquet 75007 Paris, au prix de 60 euros TTC. sur la meunerie française, conclut son étude par la constatation que cette chute des exportations a conduit cette profession dans une période charnière exigeant sa restructuration.
En 2003, la meunerie a écrasé 5,6 millions de tonnes de blé soit 15,5 % du blé produit, pour une production de farine de 4,4 millions de tonnes, dont 83 % utilisés sur le marché intérieur qui est quasi stable entre la panification, la biscotterie et la biscuiterie, contrairement à l’exportation. C’est donc essentiellement sur le marché extérieur qu’il faut chercher la cause de la baisse d’activité de la meunerie.
Un plan de restructuration
Cette forte régression de l’exportation est due d’abord à un développement des équipements en moulins de pays traditionnellement importateurs de farine et qui ont choisi d’écraser chez eux des blés importés. Certains pays, comme la Turquie ou les Émirats arabes unis sont devenus concurrents de la France sur les marchés extérieurs. La meunerie française est passée en un état de surcapacité qui a justifié un plan de restructuration financé par la profession et l’Onic, en 2000.
La restructuration avait déjà été nette depuis 10 ans, le nombre de moulins passant entre 1993 et 2003, de 828 à 523, soit une baisse de 37 %. Parallèlement, la capacité moyenne des moulins a progressé de 27,5 % pour atteindre une moyenne de 10 800 tonnes. Néanmoins, le secteur demeure très atomisé et 216 moulins écrasent moins de 1 000 tonnes, n’utilisent qu’environ 40 % de leurs droits d’écrasement et représentent 1 % des écrasements totaux français. Tandis que les 30 premiers moulins représentent 50 % des écrasements.
L’enjeu d’une restructuration du secteur est de stabiliser les marchés intérieur et extérieur au moins à leur niveau actuel en agissant sur les structures pour contrebalancer l’accroissement des charges, le pouvoir de négociation de plus en plus fort de l’industrie de transformation de la volatilité des prix de la matière première, le grain, alors que le prix de la farine stagne ou baisse ; bref, de préserver la compétitivité de la meunerie française.
L’étude conclut à une restructuration conduisant à la réduction des capacités d’écrasement, mais souligne aussi les risques de cette stratégie. Car si la meunerie française est sur capacitaire, celle des autres pays européens l’est tout autant, parfois plus et la réduction de notre surcapacité pourrait offrir des opportunités à nos concurrents européens.
Par ailleurs, l’atomisation actuelle de la meunerie n’a pas que des causes et des conséquences négatives. Les petits moulins de moins de 1 000 tonnes sont les fournisseurs privilégiés, à 86 %, de la boulangerie artisanale qui représente 43 % de la panification. Qui plus est, ils n’encombrent pas le marché de l’exportation. Tout aménagement des structures devra tenir compte de l’éparpillement de ce débouché et de la diversité de ses besoins, correspondant à l’évolution du goût du consommateur en faveur des pains variés. Ce qui suppose parfois pour le meunier local la fourniture de véritables farines sur mesure.