« La Coordination rurale a gagné en maturité »
Les Marchés : Quels enseignements tirez-vous des élections aux Chambres d’agriculture ?
François Lucas : Nous avons fait la preuve que nous étions un syndicat en pleine force de l’âge et que sommes aujourd’hui le deuxième syndicat en métropole. Nous avons pu présenter des listes dans 80 départements en France cette année contre 57 seulement en 2001.Nous gagnons indéniablement en crédibilité, même si notre discours n’a pas changé. Mais nous sommes déjà en train de regarder les prochaines élections et nous sommes très confiants dans notre capacité à devenir le premier syndicat agricole français, si l’on considère bien sûr que la FNSEA et les JA sont deux syndicats.
LM : Pourtant vous nourrissiez un résultat plus ambitieux, non ?
F.L. : Nous aurions en effet aimé faire mieux, comme tout le monde, et dans 5 ou 6 départements, nous sommes tout prêts de la majorité. Le vote par correspondance, l’augmentation du taux de participation ont probablement joué contre nous, tout comme peut-être aussi la meilleure santé de certaines filières agricoles, comme les céréales ou la viande bovine. Sans exclure la très opportune augmentation du prix du lait de ce début d’année…
LM : Sofiprotéol a annoncé son intention de « monter » dans le capital de Glon-Sanders. Que pensez-vous de cette opération, vous qui avez souvent dénoncé l’utilisation des fonds interprofessionnels , notamment dans les grandes cultures ?
F.L. : Nous constatons que Sofiprotéol continue de jouer au monopoly avec les finances des agriculteurs puisque les fonds proviennent des CVO (cotisations volontaires obligatoires). Ce qui nous agace, pour le moins, c’est que les producteurs ont de moins en moins le choix dans leurs débouchés. Lorsque Sofiprotéol investit dans une boite privée, c’est pour construire une superpuissance financière, professionnelle sans doute, mais une superpuissance tout de même. Nous observons les mêmes dérives sur les huiles végétales pures et dans tous les combats qui ont été menés contre nous dans le cadre de la loi d’orientation agricole ou quand à la fiscalité des biocarburants par Sofiprotéol, qui veut sauver le Diester. Notre credo est toujours de remettre les organisations professionnelles au service des agriculteurs… Pas le contraire.
LM : On se souvient des critiques émises en 2002 à l’encontre de la CR accusée alors de «porter» le discours de l’extrême droite ou des souverainistes. On vous dit notamment proche de Philippe de Villiers… Comment vivez vous la campagne présidentielle actuelle ?
F.L. : Pour la campagne proprement dite, nous avons préparé un QCM à destination des candidats et nous préparons aussi une démarche unitaire, avec les autres syndicats agricoles pour dégager une position commune et proposer aux candidats un pacte, un projet agricole commun. Que Philippe de Villiers reprenne nos propositions à son compte est un bon début, avant que d’autres les fassent. Mais s’il y avait superposition, il aurait pris fait et cause pour les huiles végétales pures, ce qui n’est pas le cas. La Coordination reste fidèle à son acte de naissance, nous accueillons toutes les tendances politiques. Et puis de toute façon, les paysans ne confondent la vie syndicale et la politique… Quelle meilleur preuve pouvons nous en avoir que leur non massif au référendum ?