Fraudes alimentaires : que risquent leurs auteurs ?
La presse a relaté ces dernières semaines la mise en examen d’un négociant soupçonné d’avoir fourni à neuf boucheries un mélange d’eau et de bisulfite de soufre pour nettoyer de la viande halal avariée destinée à être vendue aux consommateurs. Cette affaire est l’occasion de s’interroger sur les sanctions pénales auxquelles s’exposent les auteurs de fraudes alimentaires, malheureusement encore trop nombreuses.
Le délit de tromperie, caractérisé par le fait d’induire un cocontractant en erreur notamment sur l’origine et les qualités de la marchandise objet du contrat, est source d’un important contentieux, malgré des sanctions sévères prévues par les textes. Ont notamment été sanctionnées l’utilisation indue de la certification « bio », l’apposition sur le produit de fausses indications sur sa composition ou son origine géographique, l’utilisation frauduleuse d’un label agricole ou la modification de la date de péremption figurant sur l’emballage. L’auteur de ce délit est passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 37 500 euros. S’il s’agit d’une personne morale, l’amende pourra aller jusqu’à 1 875 000 euros. Les tribunaux peuvent également condamner le coupable à des peines complémentaires : interdiction pour les personnes physiques ou morales d’exercer une activité professionnelle ou sociale à titre définitif ou pour une période de cinq ans au plus, publication du jugement de condamnation aux frais du condamné (notamment dans des revues professionnelles telles Les Marchés), affichage, retrait ou confiscation du produit de la vente des aliments concernés. Enfin, les personnes physiques peuvent se voir interdire d’exercer des fonctions publiques, ainsi que certaines professions ou activités économiques.
Des délits distincts aux peines cumulables
L’ensemble de ces peines est également applicable au délit de falsification et de vente de denrées alimentaires falsifiées, corrompues ou toxiques, lequel peut parfois être commis simultanément au délit de tromperie, comme lorsque de la marchandise avariée est reconditionnée après avoir été nettoyée avec des substances nocives pour la santé de l’homme, conférant au produit une apparence comestible. En outre, lorsque le délit a eu pour conséquence de rendre l’utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l’homme ou des animaux, les peines ci-dessus sont doublées. Le délit de falsification est un délit distinct du délit de tromperie, permettant au juge, en cas de cumul des infractions, de prononcer, pour chacune d’entre elles, des peines distinctes.
Le délit de publicité trompeuse, également distinct et cumulable, et frappé des mêmes peines principales, est commis lorsque le consommateur, même s’il n’est pas le cocontractant, a pu être victime d’allégations fausses ou de nature à l’induire en erreur.
Dans tous les cas, peuvent s’ajouter aux sanctions pénales des dommages et intérêts, parfois très conséquents, au profit des victimes de l’infraction, qu’il s’agisse du cocontractant ou du consommateur. Les bénéficiaires sont aussi, de plus en plus fréquemment, des associations de consommateurs ou des organisations professionnelles ou interprofessionnelles, dont les membres pâtissent de l’image négative donnée à leur profession ou dont les efforts de promotion sont remis en cause (voir notamment l’allégation « viande bovine française »).