Deux campagnes extrêmes
Il y a un fossé entre la campagne de pommes de terre de conservation 2011-2012 et celle en cours. Les surfaces consacrées à cette culture représentaient en 2011, 113 400 hectares, sur lesquels un rendement moyen national de 48,3 tonnes à l’hectare avait fourni une récolte de 5,5 millions de tonnes (Mt), d’autant plus pléthorique que les grands producteurs voisins du Nord-Ouest européen connaissaient aussi l’abondance. Il devait en résulter une chute des prix spectaculaire qui aurait pu inciter à une réduction des ensemencements pour la campagne 2012-2013. Il n’en a rien été et c’est heureux, puisque sur 113 000 hectares plantés, le rendement moyen est tombé à 41,4 t/ha cette campagne, pour une production de 4,69 Mt, soit 14,4 % de moins que l’an dernier. La baisse est du même ordre pour les quatre autres grands pays producteurs de l’UE (Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne et Pays-Bas), l’Allemagne seule ayant bénéficié de rendements normaux lui assurant une bonne récolte alors que la production britannique se serait effondrée de 25 %.
« Du jamais vu »
Selon une étude menée par l’Union des producteurs de pommes de terre (UNPT ), une baisse de 1 % de la production de ces cinq grands pays se traduit par une hausse des cours de 11,2 %. Il n’est donc pas surprenant que les prix aient fait, cette année, un bond spectaculaire, comparé à ceux excessivement bas de la campagne précédente. Mais, comme le souligne Patrick Trillon, président de l’UNPT, un prix qui passe de 25 euros/t en juin dernier, à 250 euros en octobre, « c’est du jamais vu » ; et de dénoncer cette « volatilité », en conseillant aux acteurs de la filière de se couvrir contre ce risque, notamment par une politique contractuelle.
Les achats progressent de 9 %
Outre les prix qui satisferont les producteurs (sauf ceux sous contrat, qui n’auront pas bénéficié pleinement de la hausse), la campagne actuelle enregistre une évolution très positive de la consommation. Pour la période du 3 août (début de campagne) au 4 novembre, les achats des ménages ont progressé de 9 % par rapport à la même période de l’an dernier. Le CNIPT (interprofession) lors de son assemblée générale du 12 décembre, devait tenter de dégager les raisons de cette reprise parfois attribuée aux restrictions des budgets familiaux. Alors, la pomme de terre, « légume de pauvre » ? Pas si sûr ! L’exportation, pilier majeur de ce marché, retrouve aussi des couleurs grâce notamment aux gros achats britanniques ; mais le Sud de l’UE se montre encore discret.
Le CNIPT devait aussi se pencher sur les rapports avec la distribution : ils sont souvent tendus, en raison notamment de promotions à des prix excessivement bas. Ce genre de heurts est moins fréquent en période de marché euphorique. Mais, comme le démontrent ces deux dernières campagnes, l’euphorie n’est pas une constante.