Côtes du Rhône : plus dure sera la crise
Bien qu’amorcée plus tardivement que dans d’autres régions (janvier 2004), la crise viticole s’installe durablement dans les Côtes du Rhône. Si, sur le papier, les raisons sont facilement identifiables, sur le terrain c’est encore l’incompréhension qui domine. Un débat tendu la semaine dernière entre Inter Rhône et des vignerons des Cotes du Rhône Gardoises en a fait la démonstration. Il s’agissait à l’origine d’évoquer les moyens fiscaux et juridiques à disposition des viticulteurs pour « gérer la crise » au niveau des leurs exploitations. Mais l’objectif a rapidement été détourné pour laisser la place à une explication de texte parfois musclée. Au-delà des charges contre le négoce, c’est Inter Rhône qui s’est trouvé en ligne de mire. « Manque d’anticipation», « situation de crise connue, mais pas divulguée »: autant de critiques qui ont amené Emmanuel Drion délégué général d’Inter Rhône à d’inévitables mises au point. « L’année 2002 a été très pénalisante. Tout le monde l’a mal gérée et nous avons mis sur le marché ce qui n’aurait pas du y être.» Avant de remettre en cause, le système d’agrément : « avec 99% des volumes acceptés, c’est un agrément social. Il devient nécessaire que les syndicats modifient les règles d’agréments. » Pour Philippe Verdier, directeur marketing d’Inter Rhône, les viticulteurs ont oublié d’écouter les consommateurs. « Le manque d’empressement des viticulteurs à faire des vins corsés/fruités est évident (…) Aujourd’hui, il faut arrêter de fabriquer du vin agricole, pour proposer un produit agro-alimentaire répondant aux goûts des consommateurs(…). Les cuvées séduction représentent 2% des volumes : nous souhaitons parvenir à 20% d’ici 2010. A l’inverse, des vins basiques et premiers prix doivent passer de 70% à 30% dans le même temps. Car des Côtes du Rhône à 1 euro voire 0,8 euros chez certaines enseignes de la distribution, ce n’est pas bon ni pour l’image, ni pour la rentabilité des exploitations. »
Des fusions de caves « inévitables »
Travailler sur les goûts et sur les coûts fait partie des mesures préconisées pour gérer la situation. Mais prévient, Philippe Tichadou, du cabinet d’expertise Reveille, « il serait utopique de penser que nous reviendrons aux niveaux de prix antérieurs à la crise. A l’avenir, des fusions ou des regroupements de caves sont inéluctables afin de parvenir à une taille critique et réaliser des économies d’échelles. Car de nouveaux types de structures vont se dessiner qui travailleront soit sur des niches soit des produits de masse. Quoi qu’il en soit, le futur de la viticulture sera également décidé par les consommateurs. »Ambiance pesante et qui ne présage rien de bon pour la manifestation d’aujourd’hui à Narbonne.