Bush va continuer à défendre les Farmers
Dominique Mathieu, à la tête de deux exploitations agricoles, une dans la Somme l’autre au Texas (coton, maïs, sorgho), également vice-président de la société des agriculteurs de France, analyse les résultats des élections américaines.
LM : La forte adhésion de l’Amérique profonde et des Farmers pour Bush vous a-t-elle surpris ?
Dominique Mathieu : Pas du tout. Que les Français aient été surpris du résultat montre bien leur méconnaissance des Etats-Unis. En Amérique profonde, les gens sont encore très proches des valeurs traditionnelles que sont la famille, la religion, les enfants et le travail. Et c’est là que Bush a été élu parce qu’il représente cette Amérique traditionnelle. De plus le parti républicain a les faveurs du milieu des affaires. Le fil conducteur de Bush a toujours été de dire « je ferai tout pour que les entrepreneurs aient envie d’entreprendre ». Pour ce qui est du monde agricole, aux Etats-Unis on compte trois lobbies importants : le maïs et la viande (Corn Belt), les producteurs de sucre (en Floride) et les fruits et légumes (Floride, Texas et Californie). Les deux premiers votent essentiellement républicain et pour le dernier, seule la Californie penche davantage démocrate.
LM : Pensez-vous que George W. Bush va réorienter sa politique agricole ?
D.M. : La politique agricole américaine va continuer à protéger les Farmers avec notamment l’assurance récolte. En même temps, des voix s’élèvent aujourd’hui pour dire que la politique agricole finit par coûter cher. Néanmoins, si Bush va sûrement devoir diminuer un peu les subsides agricoles, je pense qu’il en sauvera une bonne partie pour contenter les lobbies.
LM : Les négociations à l’OMC étaient un peu en attente du résultat des élections américaines. Dans quel état d’esprit vont-elles reprendre, selon vous ?
D.M. : L’Europe qui a montré l’exemple en réformant en profondeur sa politique agricole risque d’être déçue par les Américains qui ont récemment obtenu une boîte bleue pour pouvoir garder leurs aides, notamment les contrats cycliques. Maintenant, Bush préfére faire des accords bilatéraux qui lui permettent de mieux contrôler la situation. Le problème majeur des Etats-Unis, aujourd’hui c’est la Chine avec laquelle son déficit commercial ne fait que se creuser. Bush va certainement se concentrer sur ce sujet-là, l’Europe ne lui posant pas de gros soucis.