Bordeaux : le président du CIVB analyse les raisons du succès
Les Marchés : Au cours du premier semestre 2006 les exportations de vins de votre région, mais aussi d’autres grands bassins de production viticole, ont connu une remarquable progression. A quoi l’attribuez-vous ?
A. Vironneau : Tout d’abord, les exportations de Bordeaux ont commencé à se redresser il y a un an. Ce retour à la croissance est, à mon sens, lié à deux facteurs essentiels : la qualité « moyenne » des vins qui n’a jamais été aussi bonne et des prix réellement compétitifs. Sans oublier bien sûr les efforts marketing de plus en plus performants menés par la profession.
Les Marchés : Cette amélioration s’est-elle faite sur une clientèle traditionnelle et/ou à travers de nouveaux débouchés ?
A. Vironneau : Cette amélioration ne touche pas tous nos marchés. Elle est manifeste sur le Royaume Uni ou les Etats-Unis (clientèle traditionnelle) mais également sur la zone asiatique (nouveaux débouchés). L’Allemagne reste encore à la traîne.
Les nouveaux débouchés, concernent les pays tiers et notamment l’Asie où la consommation de vin progresse de façon indéniable, avec une forte attirance pour les bordeaux
Les Marchés : Cette embellie des exportations survient après une longue période de dépression, d’inquiétude et d’analyse défaitiste quant à l’avenir des vins français sur le marché mondial. Pensez-vous que l’amélioration sensible de la situation que l’on remarque aujourd’hui soit de nature conjoncturelle ou va-t-elle se pérenniser ?
A. Vironneau. Tout d’abord, je constate que ce grand vignoble, qui a su maintenir ses ventes en grande distribution française (le premier marché du bordeaux avec les deux-tiers de la commercialisation) entreprend sa remontée à l’export après plusieurs années de baisse des vins français.
Bien sûr, nous souhaitons nous développer de façon plus significative à l’exportation. Certains marchés comme les Etats-Unis sont très sensibles à l’« effet millésime ». C’est le cas du 2003 qui est un très bon millésime, très porteur, et qui est actuellement expédié sur les marchés
J’espère qu’il en sera de même pour le 2004, un millésime très réussi …. Quant au 2005, il a fait l’unanimité !
Vous parlez de défaitisme; j’ai plutôt le sentiment que c’est une inclinaison très franco-française ! Je suis profondément optimiste quant à l’avenir des vins français et des vins de Bordeaux. Ces signes de reprise sont encourageants et les efforts entrepris par notre viticulture, en aval comme en amont, commencent à porter leurs fruits. Bordeaux a un bel avenir devant lui !
Les Marchés : Quand l’on observe les statistiques d’exportation de vins français depuis la fin 2005, on constate que la reprise d’activité s’est surtout fondée sur les VQPRD, voire les vins de très haut de gamme. Ce bilan encourageant doit-il nous faire réviser des conceptions nouvelles en matière de compétitivité par rapport aux vins du Nouveau Monde ou bien à inciter à continuer de jouer la carte de la spécificité des vins français : diversité, réputation de nos AOC ?
A.Vironneau : Oui, nous devons tenir bon et continuer à jouer la carte de la spécificité.
Que cherche le consommateur ? la qualité, l’authenticité, un nom, un terroir , une histoire, un château , une marque de référence. Et s’il a été reproché, et parfois à juste titre, un certain laxisme dans les conditions d’attribution de l’agrément de nos AOC, qui a pu nuire à leur réputation, ce reproche n’aura plus lieu d’être dans les prochains mois. Les conditions de production et la procédure de délivrance de l’agrément deviennent très rigoureuses. Nos syndicats viticoles s’y emploient vivement.
Vous savez, on finit par se lasser des vins standardisés. Standard et vin sont des mots qui ne font pas bon ménage ! Le vin, c’est un art de vivre, le désir et le plaisir de déguster – d’où diversité – l’envie de découvrir.
Mais peut-être, nos vins et la notion d’appellation d’origine contrôlée sont-ils encore trop compliqués pour le consommateur. On doit encore simplifier l’approche bordeaux, dans notre communication et dans ses modes de consommation.