AOP et IGP : ce qui va changer d’ici deux ans
Soutenus par les pays attachés aux produits de terroir et reconnus par Bruxelles, les AOP et IGP continuent de s’enraciner dans le paysage des produits de qualité et d’origine. Les règlements évoluant et s’adaptant à la fois aux différents secteurs de produits et aux contraintes mondiales, le paysage va beaucoup changer dans les deux ans qui viennent. Ainsi, le règlement 2081 de 1992 est devenu le règlement 510 suite au panel de l’OMC. De même, ce règlement va bientôt abriter également les AOP et IGP viti-vinicoles.
Concernant les produits solides, on attend impatiemment le contenu du Livre vert. Pour l’instant, il est constitué de sept ou huit propositions de la Commission et reste à remplir par les Etats membres. Dès le 1 er mai 2009, les étiquetages des produits AOP et IGP vont changer car le logo ou la mention en toutes lettres de la protection devront apparaître. Les AOC françaises ne disparaîtront pas, ne serait-ce que pour assurer la protection transitoire automatique entre la reconnaissance par la France et l’enregistrement définitif par Bruxelles. « La France ne peut reconnaître qu’en AOC, c’est la Commission qui enregistre en AOP. D’autre part, certains produits ne peuvent prétendre à l’AOP, avertit Catherine de Menthière, directrice adjointe de l’Inao pour les produits agroalimentaires, laitiers et forestiers. Ainsi, les produits forestiers, qui sont du ressort du comité des AOP à l’Inao, ne sont pas prévus dans l’annexe II du règlement européen 510. Ils resteront AOC ». Mais en dehors de cas bien précis, les AOC sont toutes appelées à devenir AOP : « Le cahier des charges contenu dans le décret est conçu dès le départ pour être homologué dans sa forme AOP » précise Catherine de Menthière.
Pour les IGP solides, pas de changement puisqu’il n’existait pas de signe équivalent en France et que l’accès à la protection se fait directement. Signalons à ce sujet que la protection transitoire entre le moment de la reconnaissance par la France et l’enregistrement par la Commission n’est engagée que sur la demande de l’ODG concerné.
Les vins empruntent le même chemin
Les vins vont aussi passer par le nouveau système des AOP et IGP. Mais à l’inverse des produits solides qui ont gagné la protection à l’échelle européenne avec les AOP et IGP, l’AOP n’apportera pas de changement aux AOC vinicoles, car elles étaient déjà protégées en Europe par l’OCM vins. Quelles seront les grandes étapes du changement pour les vins ? « Il y a trois dates importantes à retenir, fait remarquer Hervé Briand, directeur adjoint de l’Inao pour le secteur vins et eaux de vie. « La liste de l’ensemble des VQPRD (Vins de qualité produits dans une région déterminée) devra être déposée à la Commission pour le 1 er août 2009. Ensuite, les AOC et les VDQS (vins délimités de qualité supérieure) devront déposer leur cahier des charges pour le 31 décembre 2011 au plus tard. Les VDQS devront ainsi avoir choisi de présenter un cahier des charges correspondant à l’AOP ou à l’IGP. La Commission aura trois ans pour prendre position, c’est-à-dire jusqu’au 30 décembre 2014 » .
IGP à la place de VDQS
Les IGP regrouperont les Vins de Pays, parmi lesquels se trouveront les VDQS ayant opté pour l’IGP. La définition est claire : l’IGP représente un lien moins étroit (que les AOC, ndlr) entre les caractéristiques qualitatives du vin et le milieu géographique. D’autre part, le vin doit être élaboré avec au moins 85 % des raisins de la zone. Enfin, toute la production doit être réalisée dans la zone.
Par ce système, on supprime en France l’échelon des VDQS, ce qui devrait apporter plus de lisibilité pour le consommateur. « Ce qui est certain, c’est que ceux qui n’auront pas déposé leur dossier en décembre 2011 perdront la protection. La question qui reste posée sera l’identification sur les étiquettes, s’interroge Eric Tesson, responsable juridique de la CNAOC. On y verra plus clair lorsque les règlements d’application seront parus. Pour le passage en AOP et IGP, ce sera en automne prochain ; pour les étiquetages, nous n’avons pas encore de dates. » Autre question qui reste en suspens : où seront placées les IGP vins au sein de l’Inao ? « A la demande des professionnels, Il est probable qu’elles seront dans un comité spécifique IGP vins de l’Inao », répondent Hervé Briand et Eric Tesson. Michel Barnier, ministre de l’Agriculture n’y est pas opposé.
Les vins identifiés (AOC, VDQS, Vins de Pays) représentent 88 % de la récolte française. On dénombre en France 160 dénominations en Vins de Pays recouvrant 12 à 15 millions d’hl pour 10 à 12 millions d’hl agréés et commercialisés. Ils représentent 34 % des vins identifiés. Les AOC + VDQS concernent 54 % des vins identifiés. « C’est le lien entre le produit et l’aire géographique qui fera la différence dans le cahier des charges déterminant le passage en AOP ou en IGP. Si on ne justifie pas ce lien, il n’y aura pas enregistrement. Ce sera la question clé », conclut Hervé Briand.