Alimentation animale : la diversité paiera
Les fabricants d'aliments du bétail ne peuvent espérer que du bien de l'augmentation de l'offre en coproduits de blé, de betterave et de colza résultant des politiques de développement des biocarburants. Katell Crépon, ingénieur de l'Unip (union nationale interprofessionnelle des protéagineux), a montré à la rencontre annuelle des protéagineux, avant-hier à Paris, comment une plus forte concurrence entre matières riches en protéines (MRP) devrait faire baisser le prix du composant protéique de certaines formules d'aliments (notamment pour ruminants, dans une moindre mesure pour porc), tout en réduisant la variabilité de celui-ci. Les drêches de blé et le tourteau de colza issus des industries énergétiques sont proches en termes de composition et de valeurs nutritionnelles (avec près de 34 % de matière azotée, le tourteau de soja en ayant 45 %). Ils se concurrenceront donc, en particulier dans les formules pour ruminants, affirme l'exposé de Katell Crépon.
Un exemple à rebours du bienfait de la diversité de matières premières est fourni par l'amenuisement progressif de l'offre en pois protéagineux dans les années quatre-vingt-dix, qui a été suivi du bannissement des farines de viandes et d'os. Il résulte de cet appauvrissement une emprise sans précédent du tourteau de soja sur la fabrication d'aliments. Celui-ci représente aujourd'hui 52 % des matières premières utilisées en alimentation animale (source Cereopa 2005). Principale filière utilisatrice de soja, celle du poulet standard est à la merci du prix d'importation de celui-ci. Comme il est très fluctuant, la variabilité du coût de l'aliment pour poulet standard est allée s'amplifiant depuis quinze ans.
Grâce à l'émergence d'une offre émergente en tourteau de colza, le rapport de prix entre les tourteaux de colza et de soja commence à s'affaisser et se rapproche du taux de 55 % observé en Allemagne, où la production d'ester de colza est en avance. La France n'a pas le pire déficit protéique de l'Europe : 56 % alors que l'Allemagne a 70 %, l'Espagne 81 % et les Pays-Bas 96 %. Divers coproduits d'origine végétale ainsi que les fourrages déshydratés et les pois font cette situation avantageuse. Le tout est de savoir si cette variété va se maintenir.
La rencontre annuelle des protéagineux n'a donné que des éléments de réponse : l'un est l'avantage agronomique d'une rotation des cultures ; l'autre la capacité du pois à se maintenir dans les formules (en finition d'engraissement du porc notamment) sous l'assaut du tourteau de colza. Tout cela est sans compter l'hypothèse, «plausible» selon Katell Crépon, d'une utilisation énergétique des coproduits des biocarburants...