Semelles de plomb

Le ralentissement du commerce international n’est pas un croquemitaine agité par de mauvais augures ; c’est une sensation devenue bien concrète, comme celle que ressentirait un sprinter chaussé de semelles de plomb. Sur les deux premiers mois de l’année, selon Agreste, les importations françaises d’agroalimentaire ont baissé de 9,8 % ; les exportations de près de 17 %. Autant dire que le solde du secteur, un des indicateurs dont il est à juste titre le plus fier, se dégrade à vitesse grand V. En février, le solde de la France avec les pays tiers est même devenu négatif. Le moment est choisi de soulever la question du regrettable opportunisme français à l’export, notamment sur les destinations lointaines. « La politique française consiste à considérer que les ambitions à l’export se mesurent au financement que l’on est capable de mobiliser. C’est une erreur de jugement terrible, car ce n’est pas la subvention qui va faire exporter une entreprise, c’est l’adéquation de son produit au marché visé », ironisait récemment un opérateur étranger. C’est que dans notre pays, tout le monde a des idées imbattables pour faire rayonner les produits de ses obligés partout dans le monde. Dans une région que nous ne citerons pas, des chefs d’entreprises se sont retrouvés à une réunion export face aux représentants de 14 établissements différents, tous prêts à leur accorder quelques subsides. Il est de bon ton de railler régulièrement le jacobinisme de la politique française. Il serait temps de porter son regard vers ces régions dont les présidents se gonflent d’importance en menant une mission export au Vietnâm ou en inaugurant une représentation en Chine. A quel prix et pour quel bénéfice ?