S’approvisionner localement en Ile-de-France, une utopie ?
Alors que le mouvement des locavores, populaire aux Etats-Unis, arrive en France, un colloque a rappelé, hier à Paris, les difficultés rencontrées par l'agriculture de proximité en Ile-de-France. Organisateur de l'événement, le conseil économique et social régional d'Ile-de-France a dressé le constat suivant : 100 000 ha de terres fertiles ont disparu en l'espace de 50 ans au profit de l'expansion urbaine et les terres agricoles destinées à l'alimentation locale ne représentent que 12% des terres cultivées.
Philippe Mauguin, directeur régional et interdépartemental de l'agriculture et de la forêt d'Ile-de-France, a aussi rappelé que 3 exploitations sur 4 dans la région sont centrées sur les grandes cultures. Malgré l'augmentation de la demande, le nombre de maraîchers, d'éleveurs et d'arboriculteurs a reculé respectivement de 5,3%, 9,4% et 15,1% par an entre 2000 et 2007. Pression sur le foncier périurbain et difficulté à trouver et loger de la main d'œuvre saisonnière font partie des raisons évoquées pour expliquer cette situation. Selon la DRIAAF, 21% des exploitations franciliennes réalisaient de la vente directe en 2007, et des initiatives comme la cueillette à la ferme (réseau Chapeau de pailles, 30 exploitations) se multiplient.
Beaucoup d'Amap, peu de fournisseurs
Autre phénomène en vogue, la création d'association pour le maintien d'une agriculture paysanne (Amap), au nombre d'une soixante en 2008. Mais le phénomène risque de rester marginal faute de fournisseurs. Intervenant au colloque, Charles Monville, jeune néo-agriculteur, a mis six ans à trouver 4 ha en Ile-de-France pour élever des volailles. Provisoirement installé en Touraine, l'exploitant fournit une Amap d'Ile-de-France, mais a dû refuser trois ou quatre propositions, faute de volume suffisant. « Mon objectif est de tripler la production pour atteindre le stade économiquement viable de 150 poulets par semaine et livrer les Amap et la restauration collective », précise-t-il. René Kersanté, issu de trois générations de maraîchers, a eu plus de chance. Locataire auprès de la mairie de St-Denis, il fournit directement 14 grandes surfaces. Il fait partie des deux derniers maraîchers de la ville, qui en comptait 60 il y a quarante ans.