Aller au contenu principal

Pac et concurrence : un rapport sénatorial d'information fait le point

Le rapport d'information du Sénat du 10 décembre 2013, porté par le sénateur Jean Bizet, retrace l'histoire conflictuelle de la Pac et du droit de la concurrence : les objectifs fondamentaux de ces deux piliers du « marché commun » sont en effet difficilement conciliables. Analyse.

Le rapport « Pac et droit de la concurrence », porté par le sénateur Jean Bizet et rendu public le 10 décembre 2013, constate l'ascendant pris par le droit de la concurrence sur la politique agricole commune (Pac) du point de vue tant juridique qu'économique et politique, et déplore la marge de manœuvre de plus en plus réduite laissée à l'État et aux filières pour organiser l'économie agricole.

Après avoir rappelé qu'il existait des « aménagements » au droit des ententes du fait de la spécificité du secteur agricole, le rapport estime que la plupart de ces tolérances ont à présent une portée limitée : soit la jurisprudence y a mis des conditions strictes – décision Frubo de la Commission du 25 juillet 1974 selon laquelle des accords anticoncurrentiels ne pouvaient être tolérés que s'ils servaient l'ensemble des objectifs de l'article 39 –, soit la mise en place des OCM (organisation commune des marchés) interdit d'adopter ce type d'accords. La question de l'entente sur les volumes, tolérée pour assurer la qualité du produit, n'a toutefois pas été abordée ; or cette exception est aujourd'hui la plus efficace dans certains secteurs comme celui des vins et des spiritueux.

Analysant les récents contentieux et précontentieux, le rapport critique l'abandon en 2008 des recommandations de prix de l'interprofession du lait (Cniel) sous la pression de la DGCCRF (même si ces « recommandations » ont été remplacées par des « indices »), ainsi que la décision du 6 mars 2012 de l'Autorité de la concurrence, condamnant les producteurs d'endives à une lourde amende, alors qu'elle n'avait pas constaté d'effets graves sur la concurrence.

Le « mini paquet lait » encensé

Le rapport encense le « mini paquet lait » (règlement 261/2012) qui permet aux organisations de producteurs (OP) de négocier les prix et les volumes avec les transformateurs sans transfert de propriété, pratique jugée anticoncurrentielle dans les autres secteurs, tout en regrettant qu'il ne soit pas mieux appliqué et que la DG Concurrence reste hostile à cette concentration des producteurs (« vendre ensemble n'est pas soutenable à terme »).

Il regrette une position parfois intraitable de l'Autorité de la concurrence en matière d'abus de position dominante, sanctionnant la position dominante plutôt que son abus, avec comme exemple l'obligation pour la coopérative Agrial de vendre deux cidreries pour pouvoir acquérir Elle & Vire (Décision no 11-DCC-150 du 10 octobre 2011).

Il relève néanmoins que selon les classements des Autorités nationales de concurrence établis par un cabinet anglo-saxon et la DG Concurrence, l'Autorité française de la concurrence est très bien notée et est citée comme « ayant une approche du monde agricole très correcte ».

L'État doit reprendre son rôle

Les auteurs souhaitent en définitive que l'État reprenne son rôle, y compris en matière de concurrence : le ministère de l'Agriculture devrait être davantage consulté par l'Autorité dans les contentieux, tandis que celle-ci devrait être moins sollicitée au moment de l'adoption de règles intéressant la concurrence afin que ne lui soit pas attribué un rôle de « colégislateur ».

Même s'il s'inscrit dans une tradition dirigiste et critique parfois violemment la concurrence (ses excès seraient à l'origine de « l'ESB et [du] Horsegate de 2013 »), ce rapport n'en méconnaît pas les bienfaits. Il estime toutefois que le droit de la concurrence ne peut s'appliquer universellement et que l'État et les filières doivent profiter au maximum des aménagements, en simplifiant et en libéralisant les marchés progressivement, tout en tenant compte des facteurs socio-économiques des différents secteurs agricoles : Turgot, déjà, en avait fait l'expérience à ses dépens en 1776.

LE CABINET RACINE

Racine est un cabinet d'avocats indépendant spécialisé en droit des affaires. Avec un effectif total de 200 personnes en France (Paris, Bordeaux, Lyon, Marseille, Nantes, Strasbourg et Saint-Denis de la Réunion), il réunit près de 70 avocats et juristes à Paris. Il dispose également d'un bureau à Bruxelles et à Beyrouth. Bruno Néouze, associé, y traite avec son équipe les questions relatives à l'agriculture et aux filières agroalimentaires. Il conseille et assiste de nombreuses entreprises agroalimentaires et organisations professionnelles et interprofessionnelles agricoles.

Racine - 40, rue de Courcelles - 75 008 Paris - www.racine.eu

Rédaction Réussir

Les plus lus

des poules oranges
Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 25 juillet 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

vaches laitières dans des prairies en été
Où sont les vaches les plus chères d’Europe en juillet 2025 ?

Les prix des vaches laitières de réforme ont connu une envolée historique tout au cours du premier semestre, tirée par la…

Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 11 juillet 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

une silhouette de vache dans laquelle on voit le drapeau du royaume uni
Bovins : au Royaume-Uni, les prix s’écartent de leur record du mois de mai

Les prix des vaches au Royaume-Uni battent des records cette année, comme partout en Europe, sur fond de manque d’animaux.…

poules pondeuses en élevage au sol
Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 18 juillet 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

poule rousse dans un champ vu de prés
Prix des poules pondeuses – Cotation réalisée le 08 août 2025

La CPP (Cotation poule pondeuse) est publiée dans Les Marchés le lundi reflète les prix de la semaine précédente. La CPR (…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Les Marchés
Bénéficiez de la base de cotations en ligne
Consultez vos publications numériques Les Marchés hebdo, le quotidien Les Marchés, Laiteries Mag’ et Viande Mag’
Recevez toutes les informations du Bio avec la newsletter Les Marchés Bio