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« Nous sortons le commerce b to b de l’anonymat »

Directeur de la Confédération française du commerce interentreprises, Hugues Pouzin souhaite donner plus de visibilité et de poids politique aux métiers du négoce, du gros et du commerce international, peu connus de l’opinion.

Les Marchés : Vous dirigez depuis 4 ans la CGI, l'organisation professionnelle du commerce interentreprises (le « b to b »). Quel premier bilan en tirez-vous ?

Hugues Pouzin : A mon arrivée, il m’a été demandé par le président de la CGI Bernard Manhes de sortir notre secteur d’un certain anonymat. Nous avons développé depuis des relations avec les ministères, le Parlement, mais aussi avec la presse, et sommes devenus une force de proposition autonome. Nous n’avons plus besoin de consacrer la moitié d’un rendez-vous à expliquer ce que nous sommes ! Bernard Manhes est membre du conseil exécutif du Medef. Et notre apport dans la filière agricole et alimentaire a été reconnu. La CGI sera représentée au sein de l’office agricole unique, FranceAgriMer.

LM : Quel est le poids du commerce inter-entreprises aujourd’hui ?

H. P. :Nos interlocuteurs ont souvent une image biaisée des métiers du négoce et du gros. Ce n’est pas un secteur en déclin, bien au contraire. Quand on regarde les chiffres de l’Insee, les entreprises du secteur évoluent sur des trends de croissance bien supérieurs à ceux de la grande distribution. Cela tient sans doute au fait que ces entreprises évoluent sur des marchés « cachés » aux yeux du public. Or, dans des secteurs comme le matériel industriel ou les biens de consommation non alimentaires, la distribution de gros détient des positions majoritaires. Vous ne connaissez sans doute pas les leaders mondiaux de la distribution de matériel électrique : ce sont des grossistes. L’essentiel de leur marché, c’est la distribution professionnelle. Les grossistes y ont développé un savoir-faire très pointu, qui leur a permis de capter des positions majoritaires, grâce notamment au développement des services : conseil, appui à l’innovation, expertise en terme de distribution et de gestion des stocks, diversité de l’approvisionnement.

LM : Au regard de cette puissance, le secteur du gros alimentaire n’est-il pas en déclin ?

H. P. : Nos positions dans l’alimentaire sont toujours fortes, mais plus discrètes, car les grossistes sont moins présents dans la grande distribution qu’il y a 20 ou 30 ans. Le business model de la grande distribution privilégie une relation directe basée sur la massification des volumes avec les producteurs, les expéditeurs ou les coopératives. En fruits et légumes, par exemple, des acteurs comme Pomona y disposent de positions fortes. Mais globalement, c’est vrai que la livraison en GMS n’est plus le cœur du business. Les opérateurs se sont repositionnés en matière de service, en se tournant notamment vers la restauration hors foyer, un secteur en croissance permanente dont les grossistes sont les premiers fournisseurs. La force de nos métiers, notamment dans l’alimentaire, c’est la capacité à pouvoir livrer tous les jours des produits dans les endroits les plus reculés.

LM : La CGI s’est signalée par plusieurs positions publiques récentes, notamment sur les assurances-crédit. Que leur reprochez-vous ?

H. P. : Leur manque de transparence : sur les informations qu’elles utilisent pour coter les entreprises auxquelles celles-ci n’ont pas accès et sur la façon dont elles font évoluer les cotations. Or, l’important dans le commerce, c’est la confiance. Coface a répondu à notre appel en mettant en place un système qui permet aux entreprises d’être prévenues quand elles vont être décotées et d’apporter des éléments complémentaires d’information. Pour juger, il faut analyser la situation de chaque entreprise, pas seulement du secteur d’activité ; les assureurs-crédit ne sont pas forcément équipés pour le faire de façon très ciblée. Depuis que les assureurs-crédit ont réduit leur couverture, en juin, puis en décembre 2008, enfin en février 2009, les banquiers ont pris peur. Si l’on réduit la couverture, on vend moins ; or le commerce reste actif. La solution du complément d'assurance-crédit public (Cap), qui coûte très cher aux entreprises, n’est pas encore satisfaisante car elle doit monter en puissance. Elle est d’ailleurs peu utilisée. Sur 300 milliards d’euros (sur 1 300 milliards) de crédit couvert par les assurances, seulement 100 millions sont assurés par le Cap. Enfin, il faut que cette solution soit ouverte à l’export, ce qui n’est pas le cas.

LM : Votre autre grande revendication, c’est que les assureurs-crédit tiennent compte de la réforme des délais de paiement. En quoi les grossistes alimentaires sont-ils concernés ?

H. P. : Les produits alimentaires périssables bénéficient effectivement d’un régime particulier (20 à 30 jours, ndlr). Mais la loi de modernisation de l’économie concerne tous les grossistes et industriels de l’alimentaire pour ce qui concerne les équipements qu’ils achètent. La LME a fixé l’objectif de délais de paiement à 45 jours (60 jours à date de facturation), sachant que 25 % de l’économie a bénéficié d’un accord dérogatoire. Compte tenu du crédit que l’on accorde à nos clients en aval, notamment aux artisans, et qui peut aller à 120, 140 jours, tout le monde a accepté qu’il y ait une contraction graduelle de ces délais d’ici à 2012. Le problème, c’est que les assureurs-crédit ne tiennent pas compte de ces accords. Ils considèrent les factures payées au-delà de 45 jours comme des défauts de paiement. Nous souhaitons que les délais contenus dans les accords dérogatoires, prévus par la loi, puissent être appliqués.

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