Milleret diversifie ses débouchés sur le marché des pâtes molles

La fromagerie familiale Milleret, qui fête cette année ses 90 ans, souhaite développer son activité à la coupe, en restauration et à l’export pour trouver la valorisation nécessaire à son avenir. La société garde comme ambition de saturer son site pour gagner en productivité.
C’est à Charcenne, en Haute-Saône, que la fromagerie familiale Milleret produit des fromages à pâte molle depuis 1921. Une région peu laitière et surtout en dehors de toute appellation d’origine contrôlée. Un désavantage que la fromagerie a su dépasser en perfectionnant son savoir-faire dans les fromages à pâte molle, en créant notamment ses propres ferments lactiques. Sa marque principale, L’Ortolan, reste son fer de lance au niveau national, aux côtés du Roucoulons. Même si le Charcennay est le plus ancien fromage de la société, sa distribution reste très régionale, ainsi que celle de la marque Fin Fou, un fromage ovale. Sur un marché des pâtes molles de 138 000 tonnes, Milleret revendique une part de 4 % en volume. Depuis 2008, la fromagerie a investi fortement dans la communication pour soutenir le lancement de sa marque ombrelle Paysange. 5 millions d’euros bruts ont été investis en média sur deux ans. Résultat : un taux de notoriété assistée de +46 points (OpinionWay 2009-2010). Avec un appui publicitaire, L’Ortolan s’est même placé à la septième place du hit-parade total des pâtes molles hors marques de distributeurs (MDD), se positionnant derrière les grands groupes fromagers Bel, Lactalis ou Bongrain et leurs marques Caprice des Dieux, Président, Cœur de Lion ou encore Le Rustique. Pour cette entreprise familiale, souvent approchée par d’autres sociétés laitières, cette situation ne suffit plus. La hausse du prix du lait affecte son coût de revient, alors que la distribution rechigne à passer des hausses de tarifs. S’ajoute à cela la perte d’un contrat Leclerc l’an dernier, pour la fabrication de sa MDD. L’année 2010 s’est ainsi soldée par une perte nette de 300 000 euros. Une première pour l’entreprise familiale, qui reste néanmoins sereine pour 2011. Elle a en effet regagné depuis le contrat Leclerc et s’est fixé de forts objectifs pour augmenter ses volumes mais aussi mieux répartir son activité entre la grande distribution et les autres circuits.
Saturer les capacités du site
« À marque propre, le prix du lait représente 50 % du coût de revient. Sur les MDD, la part peut même atteindre 80 %. En 2010 c’est la première année où nous avons perdu de l’argent, mais nous sommes sereins pour 2011 et espérons revenir à l’équilibre », précise Denis Milleret, président du directoire et troisième génération à la tête de la fromagerie. Aujourd’hui, l’entreprise réalise seulement 3 % de son chiffre d’affaires à l’export (principalement en Allemagne à travers une entreprise de commercialisation détenue majoritairement par Laïta et Eurial), et 2 % en restauration hors foyer (RHF). Une situation que l’entreprise veut voir évoluer. « Nous avons une capacité de production de 8 000 t pour les pâtes molles. Dans un délai de deux à trois ans, nous voulons atteindre ce seuil », détaille Jean Aymes, directeur commercial et marketing, arrivé dans l’entreprise en août 2010 après être passé par Entremont, Eurial et Delpeyrat. Un moyen pour la fromagerie de gagner en productivité en écrasant ses coûts fixes, une méthode qui a réussi à Lactalis, souvent cité en exemple. Pour ce faire, la marque ombrelle Paysange va servir de pilier à un ensemble de déclinaisons de fromages pour le plateau (lancement de L’Ortolan 1921, un format familial L’Ortolan, repositionnement du Roucoulons, changement de packaging du Charcennay et du Fin Fou notamment), mais également à une diversification dans les usages. Un nouveau produit est actuellement en test pour une éventuelle commercialisation dans les prochains mois. Par ailleurs, un logo « Milleret fromager depuis 1921 » est créé spécialement pour la coupe, la RHF et l’export. Pour la restauration, une gamme Maîtres Comtois est déjà proposée (Doux, L’Original et Intense). « Ces références ont été bien accueillies par la restauration. Et nous réfléchissons à une déclinaison en plus petit format de 125 g pour l’export », souligne Jean Aymes. Au second semestre 2011, une nouvelle gamme dédiée à la coupe sera aussi lancée. « Milleret y était présent il y a quelques années mais a arrêté. Ce n’est pas neutre, il faut notamment des moules. Nous allons nous donner les moyens de nous installer petit à petit sur ce marché, qui reste important même s’il est en baisse », indique Jean Aymes.
Des synergies logistiques à trouver
L’entreprise s’appuiera notamment sur la force de vente de son GIE créé en juin 2008 avec Entremont et Juragruyère. « Depuis sa création, notre DV * a gagné deux à trois points (à 97) », précise le directeur commercial et marketing. Denis Milleret réfléchit également à mettre en place un système similaire pour sa logistique. « La prochaine étape sera la logistique. Même si nous gardons notre indépendance, on pourrait trouver des synergies avec d’autres entreprises », explique-t-il. La fromagerie Milleret est dotée de sa propre flotte de six camions pour collecter le lait des 250 producteurs installés dans un rayon de 120 km autour de l’usine. Pour réaliser un chiffre d’affaires de 53 millions d’euros en 2010, dont 27 millions à marque propre, Milleret a transformé 83 millions de litres de lait en 10 000 tonnes de fromages, dont 4 000 tonnes d’emmental Grand Cru Label Rouge en sous-traitance pour Entremont. Un contrat que Sodiaal ne semble pas vouloir remettre en cause. Entremont livre également du lait biologique à la fromagerie en attendant les volumes de trois producteurs en conversion, dès avril 2012. Au total, 100 millions de litres devraient être transformés cette année.
* La distribution valeur mesure la part de marché des points de vente commercialisant la marque étudiée.