L’Inra lutte contre l’appauvrissement de la biodiversité
L’Inra présentera au Salon de l’Agriculture ses recherches sur la biodiversité. Celles-ci mobilisent près de 100 millions d’euros, soit un cinquième de son budget de recherche total. L’accent sera mis sur la façon dont l’agriculture participe à la diversité du vivant. Des ateliers aborderont des exemples concrets sur la conservation et la gestion des ressources génétiques (l’institut gère une vingtaine de collections), la biodiversité comme matière première du sélectionneur (cas de la sauvegarde de la poule Géline de Touraine), l’utilisation de la biodiversité au sein des écosystèmes pour développer des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement (exemple du pâturage raisonné ou de la lutte biologique).
« La biodiversité est sous pression », a souligné Marion Guillou, présidente de l’Inra, hier en conférence de presse. Une quinzaine d’espèces de mammifères et d’oiseaux concerne plus de 90 % de l’élevage. L’intensification de l’agriculture est souvent considérée comme un facteur important de la transformation des communautés d’êtres vivants et des milieux, favorisant des écosystèmes, des cycles biologiques et des espèces plus productives, parfois au détriment d’autres espèces. Le réchauffement climatique pourrait également constituer une cause majeure de perte de diversité, car la modification trop rapide des paramètres climatiques condamne les espèces qui ne peuvent s’adapter ou migrer assez rapidement.
Les échanges internationaux favorisent l’introduction d’espèces envahissantes ou de pathogènes exotiques, qui modifient l’état des écosystèmes. Des travaux visent à mettre au point des outils pour détecter ces organismes de façon précoce et limiter leur expansion, voire la prévenir. L’Inra étudie de nouvelles maladies ou espèces envahissantes, comme le virus du Nil ou la chrysomèle du maïs. L’action de l’homme n’est pas toujours négative. Ainsi, l’agriculture a engendré la création de nouvelles races animales, de nouvelles variétés de plantes et de nouveaux ferments pour l’industrie agroalimentaire.
Les vieilles races remises au goût du jour
« Des races traditionnelles ont failli disparaître, a souligné Michèle Boichard, de l’Inra Jouy. Or, elles peuvent présenter de bonnes aptitudes, en termes d’adaptation au milieu, de qualité du produit». L’intérêt pour ce type d’animaux ressurgit depuis les années 90. C’est le cas de la Géline de Touraine, une des races de volaille française particulièrement goûteuse. L’institut a effectué son sauvetage sur les plans sanitaire et génétique. Ses efforts ont été récompensés par l’obtention d’un Label Rouge. « Des recherches sont menées sur d’autres races, afin d’étudier les conditions d’une relance, a-t-elle précisé. L’organisation collective des éleveurs est déterminante pour la réussite du projet ». Parallèlement à la relance de populations vivantes, l’institut réalise une conservation, par le biais d’une cryobanque. A propos des pays en voie de développement, sa stratégie est d’améliorer les performances des races locales, en maintenant leurs caractéristiques d’adaptation au milieu.
« On assiste à une phase exponentielle d’introduction de ravageurs exotiques », a signalé Jean-Claude Malausa, de l’Inra Antibes. Le chercheur a présenté trois stratégies de lutte biologique, permettant de préserver la biodiversité des agrosystèmes. L’une est la conservation de milieux. Elle permet de limiter la population de ravageurs. Une autre consiste à acclimater des auxiliaires. Il s’agit d’une lutte biologique classique. La troisième est de lâcher des auxiliaires de manière massive ou répétitive. De son côté, Michel Beckert, de l’Inra Clermont, a insisté sur la remontée de la diversité génétique des espèces cultivées, après une phase de décroissance entre le début de l’ère industrielle et le milieu du vingtième siècle.