Les vins de cépage ont conquis les Français
La filière française du vin a longtemps craint, en adoptant les vins de cépage, d’ouvrir la porte de la concurrence aux vins du Nouveau Monde. En fait, les Français y ont plutôt gagné sur le marché international. Et ils y ont pris goût.
Rédaction Réussir
L’édition 2011 de Vinexpo, qui s’est tenue la semaine dernière à Bordeaux, a confirmé l’ancrage de gammes de vins de cépage dans l’offre des opérateurs français, longtemps réticents à adopter cette classification « anglo-saxonne ». Adaptés à la demande internationale, les vins de cépage séduisent également les consommateurs français, qui en apprécient le bon rapport qualité-prix. La principale catégorie, celle des vins IGP (indication géographique protégée) avec mention de cépage, témoigne de cet engouement. En 2009-2010, 47 % des 5,2 millions d’hectolitres de vins de cépage pays d’Oc IGP (qui pèsent à eux seuls 92 % des vins IGP de cépage français) ont terminé leur course sur le marché français. Après plusieurs années de croissance à deux chiffres, les ventes de vins IGP avec mention de cépage ont progressé, en volume, de 8,3 % en grande distribution 1, un résultat d’autant plus remarquable que la consommation globale est en baisse.
Un risque de standardisation
L’autre catégorie, créée il y a deux ans à peine, des vins sans indication géographique avec mention de cépage n’est pas en reste. Cette « entrée de gamme » des vins de cépage a réussi une percée notable. En mai dernier, elle pesait déjà, pour la campagne 2010-2011, un quart des ventes de vins sans IG, avec des croissances en volume de plus de 160 % et des cours qui sont en moyenne supérieurs à ceux des vins ne mentionnant pas de cépage 2.
Une croissance qui s’explique en partie par le bon rapport qualité-prix des vins de cépage. La moyenne des prix des vins IGP avec cépage est de 2,51 euros en bouteille, et 1,57 euro en Bib (bag-in-box), soit un prix moyen de 1,87 euro. Mais la croissance est aussi tirée par le conditionnement en Bib, en plein boom et particulièrement adapté à cette catégorie de vin. Les ventes d’IGP avec cépage en Bib ont progressé de +12,9 %, tandis que les ventes en bouteilles piétinaient (- 1,1 %). Les deux tiers (66 %) des IGP avec cépage sont désormais vendus en Bib 1.
L’émergence des vins de cépage porte-t-elle en elle un risque de standardisation du vin français ? De fait, les ventes sont dominées par cinq ou six cépages, les mêmes en France qu’à l’international, avec quelques différences : chardonnay et sauvignon en blanc, merlot, cabernet sauvignon et, dans une moindre mesure, syrah et pinot noir en rouge. Ce risque d’uniformisation n’a pas empêché des régions de moindre notoriété de capitaliser sur leur cépage autochtone. C’est le cas de Cahors, qui faisait en quelque sorte front commun cette année à Vinexpo avec les vins d’Argentine sous le slogan « Cahors Malbec », le cépage qui forme leur culture commune (lire aussi page 22). Une stratégie de conquête de notoriété internationale qui nourrit la volonté des vins de l’appellation de faire bondir leur part à l’export de 20 % actuellement à 50 %, annonçait sur le salon Jean-Marie Sigaud, coprésident de l’Union interprofessionnelle du vin de Cahors (UIVC).
1. Chiffres volumes Iri-Infoscan sur treize périodes de 2010.
2. Chiffres FranceAgriMer.