Les protéagineux « stratégiques » pour l’agriculture de 2030
Quelles innovations permettront à l’agriculture de répondre aux défis de 2030 ? Professionnels, chercheurs et étudiants étaient rassemblés mercredi à la cité des sciences et de l’industrie à Paris pour répondre à cette épineuse question. Cette conférence s’inscrivait dans le cycle de rencontres « parlons agriculture », initié fin avril par Michel Barnier, grand absent de la journée pour cause de négociations mouvementées avec les pêcheurs. A l’heure où le projet de loi OGM occupe encore tous les esprits, les discussions ont étrangement plutôt porté sur l’évolution des pratiques culturales. La distribution sauvage de tracts anti-OGM en début de colloque aura peu influencé la teneur des débats, très orientés vers les productions végétales.
« L’avenir est au développement adaptatif régulé, terme que je préfère au développement durable », a déclaré Joël de Rosnay, conseiller du président de la Cité des Sciences et de l’Industrie et président de Biotics International. Celui qui s’avoue «lacto-ovo-végétarien» a estimé : « c’est par la frugalité que l’on arrivera à sauver la terre pour 2030 ». « La viande que nous mangeons trop est à la fois dangereuse pour l’environnement et a des effets sur la santé », a-t-il argumenté. L’avenir passerait, selon lui, par le retour dans les assiettes d’associations ancestrales du type riz-soja, couscous-pois chiche ou maïs-haricots rouges. Mais depuis une trentaine d’année, l’Europe a oublié l’intérêt des légumineuses au profit du blé tendre, à l’inverse des Etats-Unis et de l’Amérique du Sud, a rappelé un agriculteur. Une situation que ne devrait pas arranger la réforme de la Pac, si l’on en croit les propos de Xavier Beulin, premier vice-président de la FNSEA, sur les récentes propositions de Bruxelles. « On va vers une intensification du système de monoculture en Europe », a-t-il regretté.
Recherche sur les protéagineux panifiables
Pour autant la recherche française ne s’interdit pas de réfléchir à la réhabilitation de ce type de culture. « A l’agence nationale de la recherche, nous avons lancé un atelier de prospection pour trouver parmi les protéagineux ceux qui pourraient remplir une fonction alimentaire importante en France, comme les protéagineux panifiables », a ainsi déclaré Michel Griffon, directeur général adjoint de l’ANR. L’agence vient aussi de lancer un appel d’offre, Systerra, doté de 12 M Eur sur trois ans pour comprendre le fonctionnement des mécanismes écologiques dans des agro-systèmes. « C’est scandaleux que l’on n’ait pas plus développé jusque-là la recherche sur la lutte intégrée », a lâché Michel Griffon, réagissant à une remarque de la salle sur la disproportion des moyens accordés aux biotechnologies par rapport aux plus traditionnelles recherches en matière de microbiologie des sols et d’entomologie.
Si le développement des productions végétales semble stratégique pour l’avenir, leur utilité pour l’élaboration d’agrocarburants a soulevé nombre d’interrogations mercredi Porte de la Villette. « Il faudra des carburants mais dans quelle proportion ? Un réglage n’est pas encore trouvé là-dessus, on n’est pas à l’abri d’une baisse subite du prix du pétrole », a analysé le journaliste scientifique Mac Lesggy.