Les mots pour le dire
L’union des bouchers-charcutiers-traiteurs lorrains est mécontente. Elle l’a écrit à Pascal Berenguer, le milieu de terrain du club de football de l’AS Nancy-Lorraine cette semaine. A l’issue d’un match particulièrement heurté disputé contre l’équipe de Nice, le joueur avait cru défendre l’honneur de son équipe contre les sous-entendus indélicats de l’équipe adverse en proclamant haut et fort devant la presse : « on n’est pas des bouchers». Le syndicat de la profession lui a rappelé dans un courrier également diffusé aux media que « la boucherie est un métier noble et pas méchant» et que la prochaine fois, il devrait faire attention à son vocabulaire. Ce que fit le conciliant Pascal Bérenguer en s’excusant sur le site internet du club qu’il avait prononcé ces mots sans arrière-pensée et que « cette expression était couramment employée dans le milieu du foot». Quelle leçon tirer de cette considérable affaire ? Que les bouchers-charcutiers-traiteurs ont raison. Les mots ont leur importance et finissent par modifier la réalité. Regardez l’actualité de ces derniers jours. L’emploi du mot « remplacer» plutôt qu’« abroger» a suffi à sauver l’emploi d’un Premier ministre. Vendredi, l’envahissement des locaux de Monsanto France (dont la moitié des essais OGM en France ont été détruits ces dernières années) a été qualifié par ses participants « d’opération de contrôle». L’expression donne évidemment aux incidents qui se sont produits sur place un relief plus favorable aux manifestants qu’à l’industriel des semences. Ainsi va le monde. Les mots nous dirigent et l’on y prête jamais assez d’attention.