Les comportements se modifient lentement
Organisée par le pôle de compétitivité Vitagora, la première édition des Rencontres européennes « Goût, Nutrition, Santé », à Dijon, a réuni sur deux jours, acteurs des industries agroalimentaires (Senoble, Bonduelle, Marie Surgelés, Fleury Michon), et organismes de recher-che publics et privés. Les journées de Dijon ont abordé des thèmes variés, comme celui des nouveaux procédés préservant les valeurs nutritionnelles et sensorielles des aliments et l’identification des micronutriments. Mais, c’est sur les goûts et les préférences des consommateurs que les débats furent particulièrement animés.
Premier constat : le consommateur n’est pas armé pour faire face à la grande diversité des produits alimentaires d’aujourd’hui. Sophie Nicklaus, chercheur à l’UMR Inra/Enesad/Flavic a estimé que notre mémoire sensorielle avait des conséquences sur nos préférences alimentaires. Elle participe à la formation de la décision qui conduit à l’acte d’achat. Mais, d’autres déterminants y participent, le prix par exemple. « Les labels de qualité, la différence entre agriculture bio et conventionnelle interviennent aussi dans les arbitrages du consommateur. »
Un phénomène complexe
« Pour les seniors, tout le travail des industriels porte sur la fabrication d’aliments qui puissent pallier la perte naturelle d’appétence et de goût, a expliqué Stéphane Maloisel, des repas-santé, plats cuisinés dédiés à cette catégorie de consommateurs. » L’enjeu est ici de concilier les qualités hédoniques et les propriétés nutritionnelles des aliments. À l’autre bout, le projet Opaline étudie les tenants et les aboutissants de la formation du goût, en intégrant l’aspect sensoriel, psychologique (relation mère-enfant), mais aussi les phénomènes se déroulant pendant la grossesse et dans les six premiers mois de la vie : le passage de l’allaitement à une nourriture solide a été jugé déterminant.
Le débat a aussi tourné sur la promotion des produits surtout fruits & légumes (on était en pleine semaine Fraich’attitude). Certains n’ont pas mâché leurs mots, comme Laurent Brondel, du Centre européen des sciences du goût : « Les recommandations paraissent péremptoires, d’autant qu’elles changent tous les ans. Ce qui convient pour un individu n’est pas forcément adaptable au plus grand nombre. » « Dans la promotion de la consommation, l’intention de la profession et des pouvoirs publics ne suffit pas à inciter le consommateur, analyse Sophie Nicklaus. Son identité alimentaire s’est construite jour après jour, à travers ce qu’il mange. Il faut jouer sur la dynamique de long terme, en commençant chez l’enfant ».