Légumes d’industrie : la crainte des distorsions de concurrence
L’inquiétude des professionnels était sensible, mercredi dernier, lors de l’assemblée générale du Cénaldi, Comité économique des légumes destinés à l’industrie (conserve, surgélation…) qui s’est tenue sous la présidence d’Alain Morice. « Une réforme (de la Pac, Ndlr), qui ne nous concernait pas, représente aujourd’hui une réelle menace pour les productions végétales non aidées […] et tout particulièrement pour nous, producteurs de légumes d’industrie», a déclaré le président du Cénaldi, rappelant que le compromis de Luxembourg de juin 2003 prévoyait la désactivation des primes PAC sur les hectares admissibles consacrés aux fruits et légumes et aux pommes de terre.
En un mot, il était convenu que si un exploitant cultivant des céréales sur des surfaces primées décidait un transfert de culture vers des légumes industriels, il perdait le bénéfice de la prime sur les hectares transférés. Le risque de distorsion de concurrence entre productions et entre pays de l’UE paraissait donc écarté. Mais l’Allemagne ayant obtenu par dérogation de régionalisation la possibilité de cultiver des légumes sur des surfaces primées sans perdre le bénéfice de la prime (et l’exemple allemand risquant fort de faire tâche d’huile), il en résulterait une distorsion de concurrence estimée par le Cénaldi à 300 euros à l’hectare entre ces nouveaux producteurs et les anciens ne bénéficiant pas de primes.
Tomas Garcia Azcarate, chef d’unité à la DG agri de la Commission européenne. venu donner l’avis de Bruxelles sur les problèmes qui préoccupent les producteurs de légumes pour l’industrie, s’est voulu rassurant. Il a promis que Bruxelles veillerait à la stricte application des mesures prévues pour empêcher des débordements, notamment au respect des quotas de primes décidés pour les cultures fruitières et légumières des pays qui régionaliseraient.
Une assemblée à moitié convaincue
L’Assemblée s’est montrée à moitié convaincue, exprimant par ailleurs ses craintes vis-à-vis de l’élargissement de l’Union européenne avec l’arrivée de nouveaux membres qui seront astreints à des contraintes de production beaucoup moins sévères qu’en France, notamment dans l’utilisation des produits phytosanitaires. C’est une nouvelle forme de distorsion de concurrence qui menace et Tomas Garcia Azcarate n’a pas caché les difficultés ponctuelles qui risquent de surgir au début de l’élargissement, considérant cependant que la demande de ces pays allait aussi se développer et que la forte implantation de la grande distribution française y contribuerait.
Le Cénaldi s’inquiète aussi de la démarche des producteurs de choux-fleurs bretons pour gérer la crise dans leur secteur à l’aide de 1 % des aides PAC prévues dans le budget « gestion de crise». « Si une aide est apportée aux producteurs de légumes frais pour orienter leur production vers l’industrie, cette aide doit être accessible à tous les producteurs qui livrent à l’industrie », a affirmé le président du Cénaldi. Nous suivons régulièrement le cheminement de ce dossier.