Le verdissement de la politique agricole commune
La publication par la Commission européenne d’une communication sur la Pac à l’horizon 2020 a lancé le débat : quelle est la méthode à suivre pour relever, demain, les défis de l’alimentation, des ressources naturelles et des territoires, pour assurer la préservation de l’environnement et la compétitivité de l’agriculture européenne ? Entre Paris et Londres, d’âpres négociations sont à prévoir.
Rédaction Réussir
La réforme de la politique agricole commune (Pac) fait débat depuis plusieurs années. Les discussions se sont précisées en 2010, avec la publication d’un rapport du Parlement européen sur l’avenir de la Pac après 2013, et l’organisation d’un débat public, qui a reçu plus de 5 000 contributions.
Ces réflexions ont abouti à la publication par la Commission, le 18 novembre dernier, d’une communication sur la Pac à l’horizon 2020. La Commission y souligne les nouveaux défis auxquels est confrontée l’agriculture européenne et propose de futures orientations. L’objectif principalement affiché est de « verdir » la Pac, en associant les agriculteurs à la préservation de l’environnement, à la gestion des ressources naturelles et des territoires, tout en leur assurant une plus grande stabilité économique, fragilisée ces dernières années, notamment par l’influence croissante des marchés. Ainsi, pour la Commission, la croissance verte dans le secteur de l’agriculture et de l’économie rurale serait le meilleur moyen de poursuivre la croissance et la compétitivité économique, tout en préservant l’environnement.
Face à ce programme ambitieux, les divergences se cristallisent autour de la méthode à suivre et la Commission doit donc ménager les susceptibilités nationales, ce qui affaiblit quelque peu la portée de ce document.
Le « club des ringards » contre « le club des radins »
Elle propose, en effet, trois méthodes. La première consisterait au maintien d’un « statu quo amélioré », à savoir consolider les aspects existants de la Pac qui fonctionnent bien, tout en limitant les changements. De l’aveu même de la Commission, cette solution serait la traduction d’une « opportunité manquée de réformer » la Pac, et n’a donc pas sa préférence.
La seconde méthode reposerait sur un « soutien plus équilibré, plus ciblé et plus durable » qui entraînerait davantage de modifications, mais avec une bien meilleure prise en compte de l’environnement.
Quant à la troisième voix, elle est plus radicale puisqu’elle emporterait « l’abolition progressive du soutien au marché et aux revenus » pour se consacrer entièrement aux objectifs environnementaux.
Pour reprendre l’expression d’un diplomate européen, largement citée par la presse, ce débat est celui de l’opposition historique du « club des ringards » et du « club des radins », les premiers prônant le maintien d’un soutien fort aux agriculteurs, là où les seconds souhaiteraient une réduction significative des subventions agricoles.
Dans un tel contexte antagoniste, satisfaire tout le monde relève de l’utopie. On sait la Commission favorable au maintien du principe du soutien public au secteur agricole, notamment via des subventions directes, tout en modifiant ses instruments actuels pour y inclure davantage de mesures concernant les marchés. Reste à déterminer l’ampleur desdites mesures.
Avant même sa publication officielle, le texte de la Commission avait déjà suscité de vives réactions, notamment au regard de l’augmentation inévitable des coûts supportés par les agriculteurs et, donc, de la mise en péril de leur viabilité économique.
La question du financement de cette réforme étant particulièrement sensible, c’est un compromis difficile que le Parlement et le Conseil devront trouver pour assurer, malgré toutes les divergences d’opinion, une politique agricole cohérente et efficace.