Le regain des bières du Nord-Pas-de-Calais

Le 24 février dernier, les brasseurs du Nord-Pas-de-Calais arboraient un large sourire sur le stand des Brasseurs de France du salon de l’Agriculture. Le Concours Général Agricole «Bière» avait été une nouvelle fois exceptionnel. Parmi la centaine d’échantillons testés, 13 médailles ont ainsi distingué 8 des 34 brasseries régionales. Du jamais vu à Paris !
Avec trois médailles d’or, la Page 24 a une nouvelle fois « cartonné ». Elle en avait reçu trois en 2007 et trois en 2008 ! «De quoi prétendre encore l’an prochain à un troisième prix d’excellence !», assure Vincent Bogaert, un des associés de la Brasserie Saint-Germain. Annick Castelain de la brasserie du Ch’ti est ravie : trois de ses bières sont également distinguées : « c’est important pour maintenir notre réputation de producteur de bières de qualité », explique-t-elle.
Olivier Duthoit et Mathieu Lesenne sont encore sous le choc de leur médaille d’or obtenue dans la catégorie « Bière Blonde de haute fermentation » avec leur Bracine Triple. Cela fait seulement six mois que leur petite brasserie de Blaringhem commence à produire. Parmi les autres distinctions, citons également les médailles de la Jenlain ambrée, l’Angelus d’Annoeulin, l’Abbatiale de Saint-Amand, La Belle Province des Trois brasseurs ou de la Saint Landelin mythique des Brasseurs de Gayant…
Effet Ch’ti ou pas, la bière est devenue un porte-drapeau des savoir-faire artisanaux retrouvés : le Nord-Pas-de-Calais comptait plus de 2600 brasseries en 1914. La région n’en comptait plus que 26 en 2002. On en recense désormais 34, produisant un peu plus de 4,5 millions d’hectolitres de bières par an. Et plus le marché se concentre au niveau mondial, et plus les bières de spécialité ont le loisir de se développer dans les terroirs ! « Car les gens veulent retrouver des produits de chez eux », soulignait récemment François Devos, rédacteur en chef du site internet lachope.com.
Les bières artisanales et de spécialités surfent sur le créneau de la tradition et de l’authenticité dans des niches à forte valeur ajoutée. En plein développement, et avec des progressions annuelles de l’ordre de 7% par an, elles ne connaissent pas la crise. Au Nord, les maîtres brasseurs savent allier passion et professionnalisme. Ils sont de plus en plus jeunes, ingénieurs le plus souvent, et la plupart du temps formés à l’école des brasseries des trappistes ou des Abbayes d’Outre-quiévrain (l’université de Louvain détient la plus importante banque de levures au monde). Avec toujours le même cocktail de la réussite : une capacité d’innovation, un savoir-faire brassicole éprouvé et un marketing adapté et moderne.
Plébiscite régional
Ce sont des passionnés de leur région. Créée en 2003, la Brasserie Saint Germain privilégie au maximum les matières premières régionales : malts et houblons même si c’est plus cher. L’essentiel du matériel a été acheté en Bavière : une référence. Et à Aix-Noulette (62), on ne lésine pas sur l’hygiène et la propreté. L’Angélus est produite par la brasserie d’Annoeullin depuis 1989 (2 500 hl/an). C’est une bière blonde élaborée à partir de malt d’orge et de grains crus de froment qui titre 7,3°. C’est la dernière brasserie artisanale de l’arrondissement de Lille appartenant à la famille Lepers. Bertrand Lepers est le représentant de la cinquième génération de brasseurs à la tête de l’entreprise familiale (7 salariés). Quant à la Bracine, créée en 2006 et brassée à Blaringhem depuis 2008, c’est l’une des dernières bières artisanales mises sur le marché qui se taillent un grand succès dans la flandre française. ça mérite bien un César !