Le reblochon trouve son rythme de croisière
Nichés dans les vallées savoyardes, les producteurs de reblochon ne manquent pas de travail en cette fin du mois de mai, avec le retour de l’herbe et la montée des troupeaux en altitude. Propice à l’obtention du meilleur reblochon de l’année, ce moment est pourtant celui ou la consommation se détourne de ce fromage au lait cru, qui génère un fort imaginaire lié à l’hiver.
« Il est dommage qu’il existe une telle saisonnalité, car c’est maintenant que l’on peut vraiment le savourer» estime Michel Berthet, président du syndicat du reblochon. En plus de devoir faire face à ces pics et creux annuels, les producteurs doivent s’adapter à une stagnation de la consommation observée depuis 2003, après une progression continue et régulière.
Au nombre de 1100, les producteurs mettent sur le marché environ 17000 t de reblochon par an, un chiffre qui inclut les 3500 t réalisées par les 165 artisans fermiers. La distinction entre les deux s’opère au niveau de la collecte, le reblochon laitier étant réalisé au sein de coopératives avec le lait mélangé de plusieurs produceurs, tandis que le fermier s’obtient sur l’exploitation même avec le lait d’un seul troupeau. Chevauchant diverses aires AOC dont la Savoie foisonne, les propriétaires de vaches laitières (principalement de la race Abondance) peuvent se reporter sur d’autres fromages, pour éviter de saturer un marché du reblochon étale. Avec deux grands bassins de consommation (la région Rhône-Alpes et Paris-région parisienne), le reblochon doit s’adapter à la demande pour remporter les suffrages.
Un affinage adapté au goût contemporain
Les affineurs, part intégrante de la filière, essayent de faire du « cousu main » pour répondre aux attentes, en intégrant les spécificités d’un fromage à l’affinage court (au minimum 15 jours selon le décret régissant l’AOC). C’est d’ailleurs à ce niveau que les opinions divergent entre les producteurs qui historiquement le consomment plutôt bien affiné et coulant, alors que la demande est plutôt à un certain degré de fermeté. Très peu présent à l’export (550t), il ne peut par exemple par se retrouver sur les tables américaines, la législation exigeant un affinage d’au moins trois mois pour les fromages au lait cru. Ce qui fait sa faiblesse en termes de transport et de conservation, mais toute sa force et son caractère.