Le prix très élevé du blé français pénalise l’export
Depuis le début de l’actuelle campagne, le blé américain a baissé de 35 $ à la tonne, son prix passant sous celui du maïs, fait exceptionnel, tandis que le blé français en valeur dollar n’en perdait que 10. Le prix du blé français est actuellement le plus élevé du monde (à l’exception du HRD américain) en se maintenant à plus de 196 $ FOB. L’écart entre les prix français et américains, aggravé par la baisse du dollar (au plus bas jeudi à 1,312 contre l’euro), est grandement responsable de la perte de compétitivité du blé français sur le marché international que déplorait le Conseil spécialisé céréales de l’Office national interprofessionnel des grandes cultures, l’ONIGC, à l’occasion de sa réunion mensuelle tenue mercredi.
Cette perte de compétitivité s’est traduite par l’absence de nos blés, et plus largement européens, lors des derniers grands appels d’offres, de l’Egypte notamment. Les engagements à l’exportation de blé européen sont maintenant en net repli avec 5,7 Mt contre 7,9 l’année dernière à la même date.
La politique restrictive de Bruxelles, en plus
Comme nous le signalons régulièrement dans nos analyses de marché, Bruxelles poursuit sa politique restrictive d’exportation non seulement sur le marché libre mais aussi, depuis début février, à partir des stocks d’intervention. Cette situation a amené, comme nous l’avions prévu, le conseil de l’ONIGC à réduire de 200 000 t ses prévisions d’exportations vers les pays tiers avec 6,1 Mt. Le directeur général de l’Office considère cet objectif comme réalisable ; mais pour le moment les exportateurs français travaillent sur leur « long » de certificats et ne recourent guère aux certificats « tirets ». En revanche, les ventes à l’UE sont bonnes et l’ONIGC a augmenté ses perspectives pour cette destination de 135 000 tonnes, les portant à 8,155 Mt.
Accélération provisoire des exportations d’orge
Par ailleurs, le prix du blé étant redevenu plus attractif que celui de l’orge pour les fabricants d’aliments du bétail, l’Office estime que ces derniers devraient augmenter leurs utilisations de blé de 100 000 t, au détriment de l’orge, qui se rattrape sur l’exportation. Ces exportations d’orge ont tardé à se mettre en place, mais connaissent depuis le début de l’année une forte accélération en raison du manque de disponibilités chez nos concurrents australien et canadien et, jusqu’à présent, de la limitation par le gouvernement ukrainien des exportations. Cependant, la levée des quotas ukrainiens devrait relancer cette concurrence, ce qui explique la détente actuelle du prix des orges françaises. Les engagements européens pour l’exportation d’orge ont largement rattrapé ceux de l’an dernier à la même époque avec 2,6 Mt contre 2,3, et l’ONIGC a maintenu ses prévisions d’exportation pays tiers à 0,9 Mt, faisant néanmoins passer sous la barre de 4 Mt (3,89 Mt) celles à destination de l’UE.
En ce qui concerne le maïs, l’Office n’a pratiquement pas modifié son bilan prévisionnel de janvier, si ce n’est une réduction de 100 000 t des estimations de ventes à l’UE, les stocks de maïs hongrois étant maintenant acheminés beaucoup plus facilement vers le nord de la Communauté par route et par fer, ce qui va concurrencer le maïs français.
L’accélération des reventes de stocks d’intervention sur le marché intérieur de l’UE pèse sur les prix mais a permis un dégagement considérable de ces stocks ; de près de 14 Mt en début de campagne, ils sont tombés à 6,4 Mt dont 3,9 Mt de maïs (hongrois), 1,8 de blé, 0,5 d’orge et 0,2 de seigle, pour lequel il n’y a plus d’achat public.
Stocks de report modestes
Les stocks français d’intervention sont quasi liquidés et les estimations de stocks de report en sont vierges ; des stocks de report d’ailleurs modestes, puisque l’ONIGC a réduit le report de blé tendre à 2,30 Mt contre 2,46 en janvier, celui d’orge étant augmenté de 200 000 t à 1,25 Mt, niveau équivalent à celui de la dernière campagne. Le stock de report de maïs est prévu à 1,95 Mt, soit 11 % de moins que pour 2005-2006.
Même si la moisson tient les promesses que laissent entrevoir l’augmentation des surfaces (notre numéro de mercredi) et les conditions climatiques jusqu’alors favorables, la modicité des stocks de report constituera un facteur d’équilibre.