Le commerce équitable fait bonne figure mais se vend mal
Durant la Quinzaine du commerce équitable, du 30 avril au 15 mai 2005, le label Max Havelaar et ses partenaires vont tenter une « révolution équitable ». Quinze jours pour sensibiliser les consommateurs au commerce solidaire avec les petits producteurs des pays du Sud ; quinze jours pour faire acheter des produits équitables. Car si le commerce équitable bénéficie aujourd'hui d'une image très positive dans le monde, les consommateurs concrétisent rarement leurs opinions par un acte d'achat. Cette année, sa notoriété est passée de 49 à 56 % de la population française, mais seulement un Français sur quatre déclare en avoir déjà consommé les produits.
Dans l'ensemble, le phénomène semble plus connu qu'il ne rapporte. Les produits du commerce équitable ont réalisé un CA de 81 millions d'euros de ventes en France en 2004 (l'équivalent d'un CA de PME) dont 72 millions par les produits labellisés Max Havelaar. Une croissance de près de 50 % par rapport à 2003, pour un marché qui reste minime.
La France accuse un réveil tardif sur ses voisins européens avec 1,13 € par habitant et par an consacré aux produits équitables en 2004 contre 18 € en Suisse, pays le plus avancé. Après quelques années d'hésitation, la grande distribution s'est engagée massivement en 2005 : thé, café, chocolat et récemment jus de fruits, sucre, huile, riz et coton équitables sont désormais disponibles en GMS et boutiques spécialisées.
Ce sont des produits exotiques qui concurrencent peu les produits français mais dont l'insertion dans le circuit de la grande distribution apporte une croissance importante aux marques équitables. Ainsi, l'introduction des produits Alter Eco en grande distribution a permis une croissance soutenue de +125 % de son CA entre 2003 et 2004. Notons que les produits issus de la filière Alter Eco améliorent le revenu producteur de 255 % : 0,32 € contre 0,09 € avec la filière classique pour un produit à 2,50 €.
Mais le commerce équitable n'en est qu'a ses débuts et le prix des produits, en dépit de leur qualité, reste encore un obstacle pour les consommateurs. De plus les marques Alter Eco, Ethicable, Lobodis ou Méo restent encore méconnues : ce ne sont pas elles qui permettent la reconnaissance des produits. Marques et distributeurs comptent néanmoins sur des campagnes de publicité intensives, la création d'un balisage spécifique et l'effet de la quinzaine pour doper les ventes de produits équitables. L'occasion pour le ministère des PME, du Commerce, de l'Artisanat, des Professions Libérales et de la Consommation d'apporter son soutien par de nouvelles mesures qui seront présentées la semaine prochaine.
Le défi majeur de la quinzaine consistera à démocratiser l'accès aux produits afin d'en diversifier la clientèle aujourd'hui majoritairement constituée des CSP+ et adeptes du bio (près de 40 % des consommateurs de bio consomment équitable). En fin de compte, une mobilisation timide des consommateurs de l'Hexagone, loin d'être à la mesure des immenses espoirs des producteurs du Sud.