« Le bio a besoin d’un réel soutien politique»
Les Marchés : Comment se porte la filière bio en Bretagne, alors qu’on dit l’agrobiologie en stagnation?
Yves Jan : Plutôt bien si je me réfère aux premiers éléments de l’étude prospective qu’IBB réalise actuellement auprès des producteurs et transformateurs. Les gens sont enthousiastes. Ils sont prêts à faire des choses. Mais c’est vrai que les surfaces en conversion ont très nettement été réduites. Dans mon département d’Ille-et-Vilaine, il y avait chaque année entre 30 à 40 fermes en conversion (délai transitoire de deux ans entre le conventionnel et le bio NDLR), il n’y en a plus que 3 ou 4 aujourd’hui. L’arrêt du financement des contrats territoriaux d’exploitation (CTE) et les difficultés à mettre en œuvre les contrats d’agriculture durable (CAD) ont stoppé toute progression. De toute façon, les deux ans de conversion constituent un problème. Il y en a eu beaucoup d’un coup en 2003, l’offre a dépassé la demande. Maintenant, c’est l’inverse. On constate que la consommation progresse plus vite que la production.
Les Marchés : Ce coup de frein a-t-il beaucoup changé la donne ?
Yves Jan : Depuis 2003, des transformateurs qui n’avaient que 5-10 % de leur activité en bio en sont sortis. Il y a eu des déférencements dans les linéaires de la grande distribution. Les produits trop élaborés ont été retirés pour privilégier des produits plus basiques. Des consommateurs nous appellent régulièrement pour se plaindre de ne pas trouver leurs produits favoris en magasin.
Les Marchés : Comment Interbio Bretagne peut-elle travailler pour faire évoluer les comportements des prescripteurs de l’agrobiologie ?
Yves Jan : Nous travaillons dans plusieurs directions à la fois, conformément à notre mission. Nous tentons d’être présents toute l’année auprès des consommateurs. Pendant qu’en France se déroule le « Printemps du bio» pendant douze jours, nous nous efforçons de faire « les quatre saisons du bio », avec une offre adaptée. Nous travaillons aussi avec les collectivités locales, les lycées pour les renseigner sur le bio dans les cantines. Mais ce qu’il nous faut avant tout, c’est un réel soutien politique. Nous souhaitons que les intentions du conseil régional de Bretagne (NDLR : la nouvelle majorité PS Verts UDB (gauche régionaliste) en faveur d’une agriculture durable se traduisent dans les faits. Le conseil régional aide déjà à la certification en bio des boulangers et bouchers en bio L’agrobiologie bretonne représente aujourd’hui, selon l’interprofession, 960 fermes bio ou en conversion 25 % en lait, près de 18 % en légumes, 10,6 % en volaille chair… La transformation compte 244 entreprises dont 165 entreprises réellement productrices et 79 boucheries et boulangeries.. Nous voulons surtout que le découplage des aides de la nouvelle PAC ne privilégie pas les agriculteurs les plus aidés sur une référence historique, car les producteurs bio cultivant de l’herbe (non primée) seraient les premiers pénalisés.