L’aquaculture française cherche à s'éloigner du littoral
«Quand j'étais directeur de l'Ofimer, j'avais l'habitude de dire que sur trois euros de produits aquatiques consommés en France, deux euros proviennent de poissons importés. Quand dans les hautes sphères, on dit qu'il va falloir réduire le déficit commercial des produits de la mer, c'est une tarte à la crème. Il se creusera tant que l'aquaculture ne sera pas développée en France ». Par ces propos, Alain Merckelbagh, ancien conseiller technique de Louis le Pensec et ex-directeur de l'Ofimer (Office interprofessionel des produits de la mer), a introduit une conférence sur l'essor mondial de l'aquaculture dans le cadre du développement durable, organisée hier à Paris par le Syndicat national du commerce extérieur des produits congelés et surgelés (SNCE).
« Et dire qu'il n'y a pas de sites en France pour l'aquaculture constitue une contre-vérité. Mais en France, le littoral est lié au résidentiel et au tourisme. Aujourd'hui, 20 ha seulement sont concernés par l'aquaculture, c'est ridicule », a-t-il déploré, alors qu'il vient d'achever l'écriture d'un ouvrage intitulé Et si le littoral allait jusqu'à la mer A paraître en avril aux éditions Quae. Alors que 3,7% des achats des Français au rayon marée ont porté l'an dernier Entre mai 2007 et avril 2008, source TNS pour Ofimer. sur le pangas, poisson-chat élevé au Vietnam, l'élevage de poisson en France reste au point mort. Une situation soulignée par Hélène Tanguy, maire du Guilvinec, dans son rapport rendu en octobre dernier à Michel Barnier.
Les pistes «carpe» et «saumon» à l'étude
L'élevage de juvéniles, dont la France s'est fait une spécialité, est même aujourd'hui menacé par la crise financière qui secoue les élevages grecs. Quelques projets plus ou moins aboutis s'avèrent toutefois porteurs d'espoir pour la filière aquacole française.
Selon René Adrien, directeur général du groupe éponyme, le projet Craft (mené par l'Ifremer sur l'île de Noirmoutier, en marge du littoral) d'élevage de poissons en circuit fermé commencerait à porter ses fruits. Patrice Astre, président de la Fédération française d'aquaculture, a évoqué pour sa part la possibilité de relancer l'élevage de carpes herbivores en étang. Une piste actuellement à l'étude au ministère de l'Agriculture et de l'Ecologie et qui, d’après son jugement, « risque d'évoluer vite ». Le littoral étant très convoité, la filière aquacole française travaille également au développement de l'élevage de saumon d'Atlantique en eau douce, adapté à la vente de saumon en portion. Des pistes qui pourraient alimenter le plan de développement de l'aquaculture en réflexion, suite à la mission « Tanguy ». Ce plan est attendu pour juin 2009.