L’AOP Camembert connaît un regain de forme ces derniers mois
Placé sous les feux de l'actualité dans de nombreuses émissions et dans la presse écrite, le camembert AOP (donc au lait cru) s'est indirectement offert une belle campagne de publicité ces derniers mois. Cette situation, couplée à la sortie volontaire de l'AOP des deux plus gros opérateurs de la filière que sont Lactalis et Isigny Sainte Mère, fait plutôt les affaires de l'entreprise Gillot. Récemment, cette fromagerie spécialiste de l'AOP a décidé d'investir 1 million d'euros pour augmenter la capacité de production de son site de Saint Hilaire de Briouze, dans l'Orne. D'ici quelques mois, la production quotidienne passera ainsi de 20 000 à 25 000 camemberts, grâce à la construction d'un nouveau bâtiment et à l'embauche de salariés affectés au moulage (5 emplois sur les 10 amenés à être créés). Pour faire face à la demande, « il fallait redimensionner la partie la plus petite de l'outil de production » a indiqué aux Marchés Laurent Fléchard, le directeur général. Pour certains distributeurs, les camemberts Lepetit, Lanquetot (Lactalis) et Isigny Sainte Mère, qui ne peuvent plus se prévaloir de l'AOP pour cause de lait thermisé ou microfiltré, ont besoin d'être remplacés dans les rayons, ce qui alimente la demande. « Il y a un vrai décollage, c'est clair et net » poursuit Laurent Fléchard. Les camemberts AOP produits à marque par l'entreprise ont vu leurs ventes doubler en un an, et les MDD ne sont pas en reste. Le chiffre d'affaires, établi à 28 M Eur, a augmenté de manière mécanique compte tenu de l'augmentation du prix du lait, mais le véritable indicateur, celui de l'activité, est également en hausse.
Quand l'AOP fait mieux que le standard
De manière plus globale, l'AOP marque même régulièrement des points par rapport au camembert standard. Selon l'Institut régional de la qualité agroalimentaire Normandie, le camembert fabriqué dans la région enregistre une chute de 25% en 10 ans, alors que le camembert AOP de Normandie (10% des volumes) a légèrement progressé sur la même période (+2%), des chiffres 2007 corroborés par les statistiques nationales (voir graphe). Le retrait de Lactalis et d'Isigny, qui représentaient plus des trois quarts des volumes sous AOC, offre de belles perspectives aux fabricants restants (Réaux, Graindorge, Gillot, Val de Sienne, Durand) qui vont pouvoir s'appuyer sur un cahier des charges renforcé. «La vraie différence, c'est qu'aujourd'hui il y a une concurrence saine ». Du côté de Laval, Lactalis « a pris acte sans surprise de la position de l'Inao ». Le groupe ne démord pas de ses positions « et rappelle cependant que le camembert [AOP] présente des risques spécifiques par rapport aux autres fromages et que l'enjeu de la sécurité alimentaire n'a pas été pleinement résolu dans cette affaire ».