L’AOC Comté encore plus exigeante
D’ici la fin de l’année, l’AOC comté aura un nouveau cahier des charges. Le 12 mai dernier, le gouvernement a entériné le nouveau décret régissant l’appellation. Son règlement d’application est attendu pour la fin de l’année. Ce nouveau texte découle d’une réflexion menée depuis 2000 par l’ensemble de la filière, qui souhaite répondre à plusieurs nécessités préalablement définies : premièrement, le besoin de renforcer et repréciser l’aspect terroir et artisanal de la production. « Tout le monde s’accorde sur le fait que l’originalité du produit et son côté traditionnel représentent notre fond de commerce, note Claude Vermot-Desroches, président du Comité Interprofessionnel du Gruyère de Comté (CIGC). Pour préserver cette image, il est essentiel de maintenir les fruitières et de ne pas les transformer en usines. » Ainsi, le décret encadre la croissance des ateliers, plafonne la capacité des cuves à 5 000 litres, et le nombre quotidien de fabrication à trois fromages par cuve. Par ailleurs, l’automatisation totale de l’outil de production est interdite.
Un pari sur l’avenir
Deuxième objectif, le CIGC espère par cette démarche répondre à la demande croissante des consommateurs en termes de qualité et de sécurité alimentaire. Dans cette optique, le texte s’oppose à l’agriculture intensive en fixant un rendement maximum de 4 600 litres de lait par hectare de surface fourragère. L’utilisation de fertilisation minérale azotée est également réglementée et ne peut excéder 50 litres par hectare. La qualité du fromage dépend aussi de celle des élevages. C’est pour cette raison que le décret limite la quantité de compléments d’aliments donnés aux vaches laitières, et proscrit toute culture et alimentation OGM.
Enfin, dernier objectif, cette réglementation doit permettre à la filière de s’adapter aux nouveaux modes de consommation, et de compenser la perte de vitesse de la vente à la coupe. Le texte autorise ainsi la commercialisation de comté sous forme écroûtée et donc râpée, jusqu’alors interdite. Afin d’éviter tout appauvrissement du produit et de son image, le CIGC a élaboré un cahier des charges strict.
« Ce produit n’a pas vocation à remplacer l’Emmental râpé, précise Claude Vermot-Desroches. Son coût de fabrication devrait le réserver à une clientèle haut de gamme. »
L’ensemble de ces mesures a nécessité de longues discussions avant d’être adopté à l’unanimité par les acteurs de la filière. En effet, certains fabricants souhaitaient agrandir leurs unités dans le but d’augmenter la rentabilité de leurs ateliers. L’application du décret implique également un surcoût de production de la part des agriculteurs voyant leur productivité limitée. « Par ce texte, nous prenons un pari risqué, celui de la qualité, conclut Claude Vermot-Desroches. Nous verrons par la suite si nous avons eu raison, si ce projet est économiquement viable dans la pratique. Mais le développement quantitatif a ses limites, il est essentiel de renforcer la qualité pour ne pas nuire à notre image. »