L’année de l’huile d’olive française

Avec une production de plus de 7 000 tonnes d’huile d’olive de France favorisée par des rendements exceptionnels, la récolte 2008-2009 est la quatrième en importance depuis le début des années cinquante. C’est la conséquence de l’arrivée en production des deux millions d’oliviers qui ont été plantés les dix dernières années dans le cadre du plan de relance de l’oléiculture française. L’arrivée brutale des ces nouveaux volumes va bouleverser les habitudes de mise en marché et obliger à de sévères remises en questions. Car si le phénomène est conjoncturel à un niveau aussi haut, structurellement, la production moyenne se situera dans les années à venir entre 4 000 et 6 000 t/an contre 3 500 t/an (moyennes quinquennales) depuis 10 ans. Cela veut dire que les quelque 2 000 tonnes mises en marché annuellement (dont 1 000 t en direct par les moulins) vont quasiment doubler. « Nous avons refusé un second plan de relance, explique Olivier Nasles, président de l’Afidol, car nous n’avons pas capacité à vendre ce qui pourrait être produit. Et il n’est pas du ressort de l’interprofession de s’occuper de commercialisation. » Sur le même ton, le président de l’Afidol, a lancé de nouveaux avertissements aux producteurs et aux mouliniers lors du concours régional des huiles d’olive, en février à Marseille. « Cette année marque un tournant, et ne sera pas un feu de paille. Nous allons devoir trouver de nouveaux marchés pour les 3 000 tonnes d’huiles en excédent, sans galvauder ni les prix, ni les produits. Pour l’avenir, il faudra compter avec une augmentation de 1 500 à 2 000 t/an. Nous devons développer et améliorer la vente d’huile d’olive et comme celles des olives de table ou de la crème d’olive. La cible n’est pas grosse, le fusil sera sûrement à un coup. Nous devons imaginer des stratégies d’alliance et si nous ne sommes, producteurs et mouliniers, pas capables de nous doter de vrais outils de commercialisation, la filière ne s’en remettra pas. »Une situation qui signifie également que les circuits de vente courts sont saturés et comme le prétend une expression régionale, « il faut maintenant exporter plus loin qu’à Paris. »
Groupement de mise en marché
Les mouliniers avaient pourtant anticipé en décidant la création en 2001 de « Terroirs oléicoles de France. » L’entreprise est groupement de mise en marché. Elle a développé la marque « Provincea » pour des huit huiles sous AOC dont le nom figure sur l’étiquette et une déclinaison, Provincae « huile d’olive de France », pour des huiles produites hors AOC. « Les 12 moulins qui adhèrent au groupement représentent 1/3 de la production française,explique Olivier Nasles qui en est le gérant bénévole. La vocation de la structure est de commercialiser sur des segments où les actionnaires ne vont pas, comme par exemple la grande distribution en marque propre ou MDD, ou encore les grossistes en France et à l’export. Nous avons des accords de partenariats avec Lesieur qui fournit Lenôtre, nous sommes référencés chez Carrefour, Monoprix, Cora, Auchan... et nous prospectons d’autres enseignes. Terroirs Oléicoles de France a une dimension suffisante pour une nouvelle forme de commercialisation, hors de la vente directe ou des épiceries spécialisées. Il y a une vraie demande des mouliniers pour de nouveaux débouchés, car quelle que soit la taille du moulin, aucun n’a les moyens de créer des structures commerciales efficaces. » Le groupement se concentre pour le moment sur le créneau de l’huile, mais envisage de se diversifier sur l’olive de table ou la crème d’olive (tapenade).
Crise de croissance
Néanmoins, le développement de Terroirs oléicoles de France est intimement lié à la volonté des mouliniers, qui en années normales préfèrent rester sur leurs propres circuits traditionnels. L’augmentation de la production pourrait être un déclencheur : « La crise de croissance oblige les professionnels à se remettre en cause pour aller chercher de nouveaux marchés. L’enjeu est de sortir de l’amateurisme pour aller vers plus de professionnalisme commercial. » Quoi qu’il en soit, il n’est pas question d’une baisse du prix de l’huile d’olive française. Cette année, afin que les moulins ne soient pas contraints de brader, l’interprofession met à leur disposition un système de stockage frigorifique en containers de 1 000 litres.