L’accord sur le prix du lait ne fait pas l’unanimité
La Confédération Paysanne de Bretagne reproche à la Fédération nationale des producteurs laitiers (FNPL) d’avoir négocié la semaine dernière « sur le dos des producteurs », une hausse du prix du lait de 90,4 euros pour 1 000 litres en deux temps (2 e et 4 e trimestre 2008), alors qu’elle était due, selon eux, en une seule fois. « Collusion », accuse le syndicat paysan qui ne participe pas à l’interprofession laitière. Le prix du lait payé au producteur français fait l’objet, chaque trimestre, d’une recommandation de prix nationale par rapport à la même période de l’année précédente. Les hausses trimestrielles ne sont pas continues, mais font systématiquement référence au même trimestre de l’année précédente. Chaque bassin laitier en France l’affine ensuite selon l’orientation des marchés de ses industriels.
Cette recommandation de prix repose sur l’analyse de trois courbes : le marché des produits industriels (beurres et poudres), les produits de grande consommation export (fromages notamment) et le différentiel de prix entre la France et l’Allemagne. Or pour ces deux dernières composantes, c’est la courbe des douze derniers mois qui est prise en compte. Il y a donc systématiquement un décalage de plusieurs mois entre la valeur du marché des produits laitiers à l’instant T, et le prix du lait payé au producteur.
Prix en hausse mais tanks pleins
L’année 2007 ayant été bonne sur les marchés, la recommandation du prix du lait affiche un peu plus de 25 % d’augmentation pour le deuxième trimestre 2008. Or, la rallonge exceptionnelle de 15 % de quota supplémentaire accordé par Bruxelles sur la fin de campagne 2007-2008 a rempli les tanks des laiteries à ras bord. Elles n’ont pu valoriser ce surplus que sous la forme de poudres et de beurres. Les cours de ces produits industriels ont fini par chuter. Dans les rangs de la FNPL, un de ses vice-présidents, l’éleveur laitier d’Ille-et-Vilaine Marcel Denieul, ne conteste pas l’accord passé avec la transformation, mais l’interprétation qu’en fait la Confédération Paysanne. Selon lui, payer plus cher le lait de printemps par rapport au lait d’automne ou d’hiver risquerait « de concentrer la production sur cette seule période de l’année », alors que le marché a besoin de produits laitiers toute l’année.
Une analyse partagée par Bernard Posté, délégué de la FNIL-Ouest (industrie privée de Bretagne, Basse-Normandie et Pays de la Loire) : « il vaut mieux coller au marché et encourager la régularité des apports », dit-il. A moyen terme, le décalage entre la valeur du marché des produits laitiers et du prix du lait semble intenable pour Bertrand Posté, qui plaide pour un nouvel accord sur le prix du lait. « Sans stocks ni intervention, nous risquons demain voir une plus grande volatilité du prix du lait, plus d’à-coups. La réflexion fait son chemin », assure-t-il.