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La pêche en 2050 sera à la fois durable et profitable

Réfléchir ensemble à la pêche de demain, tel était l'objectif du premier forum France Filière Pêche, les 19 et 20 novembre. Un dialogue constructif, malgré l'hostilité de certaines ONG, alors que l'on constate de réels progrès dans la gestion des ressources.

Que l accueil ! Mercredi 19 novembre. Les jeunes du lycée professionnel maritime et aquacole d'Étel (56) se sentent agressés à leur arrivée à la Cité de la mode et du design, à Paris, pour participer à la première édition du forum France Filière Pêche (FFP). Entourés de caméras et micros, une vingtaine de militants écologistes des ONG ” Bloom et WWF manifestent sur le trottoir leur hostilité à la pêche en eau profonde, déguisés en poulpe, requin et autre poisson de mer. « Ils nous attaquent alors qu'ils ne connaissent rien à la mer », lance un lycéen, rapidement calmé par un professeur. « Des guignols », lâchera plus tard, en colère, Olivier Leprêtre, président du Comité régional des pêches du Nord-Pas-de-Calais. Recueillant ainsi des applaudissements nourris, à l'occasion du débat organisé par la FFP sur le thème « La pêche en 2050 ? ». L'objectif de cet évènement, clos le 20 novembre après-midi : « écouter, montrer et débattre », explique d'entrée de jeu Gérard Higuinen, président de l'association. Avant de passer la parole aux jeunes lycéens venus de plusieurs côtes de France. Un film les montre passionnés et appliqués à découvrir des techniques de plus en plus complexes.

Le pêcheur de demain sera un ingénieur de la mer

«Le pêcheur de demain sera un ingénieur de la mer, une sentinelle de la mer, un spécialiste halieutique », commente Gérard Romiti, président du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM). Pas question d'appauvrir la ressource, les nouvelles générations ont bien conscience que la pêche durable est essentielle pour l'avenir de leurs métiers. «Les systèmes électroniques qu'ils utilisent ne sont pas synonymes de surpêche, au contraire cela permet de faire de la pêche sélective», tient à préciser le responsable professionnel.

600 M€ ALLOUÉS À LA FRANCE JUSQU'EN 2020

« Attention, notre flotte est achetée par les étrangers pour les quotas », a prévenu Gérard Romiti, président du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins, le 19 novembre. « Il faut une vraie politique maritime en France », a-t-il lancé, regrettant aussi le manque de moyen de l'Ifremer. « C'est un choix qui se fait au niveau national », a répondu Bernhard Friess de la DG Mare. Les professionnels devront surveiller de près la répartition des fonds alloués par Bruxelles à la France pour la période 2014/2020, de près de 600 millions d'euros. Les arbitrages se feront dans les prochaines semaines, a confié Alain Vidalies, secrétaire d'État à la Pêche, le 19 novembre. Un « chantier lourd », a-t-il précisé, qui reviendra à « définir la stratégie pour la pêche française et l'aquaculture à l'horizon 2020 ».

Un point de vue partagé par Bernhard Friess, directeur Atlantique et régions ultrapériphériques de la DG Mare, à la Commission européenne : « la mer est le capital des pêcheurs ». Et ils l'ont bien compris. «Les pêcheurs connaissent mieux la mer. La gestion des stocks et la durabilité s'est améliorée en Atlantique Nord (un peu moins en Méditerranée) », déclare-t-il en tribune. Selon lui «les stocks sont aujourd'hui principalement bien gérés (à 60% en 2012 contre 6 % en 2005) ». Phénomène qui s'accompagne d'une meilleure profitabilité des pêches, en France notamment au niveau de la pêche côtière, dont la DG Mare estime le niveau de profit à 15 % en 2012. En Méditerranée, les stocks de thons rouges progressent à nouveau.

Améliorer la visibilité

« Alors pourquoi ne pas faire disparaître ces Nuits des longs couteaux bruxelloises chaque année mi-décembre qui décident des quotas de pêche pour l'année d'après ? », lance Gérard Romiti, à quelques jours du début des hostilités. « Pour pouvoir installer des jeunes, il faut trouver un autre système. Avec une visibilité sur trois ou quatre ans, plutôt que des quotas négociés chaque année », poursuit-il. Une visibilité qui encouragerait peut-être les banques à soutenir le secteur alors qu'un renouvellement de la flotte s'avère plus que nécessaire. Espoir quelque peu douché par le représentant de la DG Mare. « Là où il y a de vrais plans de gestion, il n'y a pas de mauvaises surprises à Bruxelles. Il y a des stocks qui doivent encore progresser », répond Bernhard Friess, estimant que « les quotas doivent rester à un niveau qui permet au secteur de survivre, d'avoir une bonne profitabilité. »

Coopération avec les scientifiques

Et pour fixer les quotas au plus juste, pêcheurs et scientifiques doivent se parler. « La coopération avec les scientifiques s'améliore de jour en jour », se félicite Gérard Higuinen. « Pour calculer le rendement maximal durable, il faut connaître la biomasse et l'effort que l'on fait subir sur cette espèce. Et pour bien connaître cette biomasse, il faut améliorer l'acquisition de données », complète François Jacq, PDG d'Ifremer (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer), citant un partenariat avec FFP sur le bar et un autre sur les petits pélagiques (avec l'Association méditerranéenne des organisations de producteurs, ndlr). Pour autant « on ne comprend pas tout », reconnaît-il.

Sur la question épineuse des espèces de grands fonds qui focalise l'attention de certaines écologistes, le patron de l'Ifremer se montre prudent : « la pêche de grands fonds n'est ni le bien ni le mal. On ne sait pas tout sur ces espèces ». Accusé de « faire passer les pêcheurs pour des assassins », par Olivier Leprêtre, De-nez L'Hostis, président de France Nature Environnement (FNE), se défend. Marquant ses distances avec les ONG manifestant devant les portes du forum, il se déclare en faveur « de processus de durabilité à améliorer ».

Les stocks sont aujourd'hui principalement bien gérés

Le mot de la fin revient à Thomas Laurenceau, rédacteur en chef de 60 millions de consommateurs : « Moi consommateur, je ne sais pas qui croire. Qui croire sur le chalutage profond ? Ou encore sur les huîtres triploïdes alors que les conchyliculteurs disent qu'ils n'y croient plus eux-mêmes…»

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