La fonctionnalité alimentaire, un nouveau défi pour les IAA
Les observations scientifiques et nutritionnelles relatives à l’action positive des aliments sur la santé ne cessent de se multiplier. Cette fonctionnalité alimentaire a fait l’objet d’une conférence de l’Institut français pour la nutrition (IFN), jeudi à Paris. « La valeur d’un aliment ne s’arrête pas aux propriétés nutritionnelles et sensorielles, a expliqué Luc Méjean, professeur à l’École Nationale Supérieur d’Agronomie et des Industries Alimentaires (Ensaia) de Nancy. Des connaissances récentes montrent que l’alimentation peut également moduler certaines fonctions de l’organisme. Cela ouvre des horizons intéressants, vu l’augmentation des coûts de santé et le désir toujours plus présent des consommateurs d’améliorer leur qualité de vie. »
L’acide linoléique conjugué, présent dans les viandes d’agneau, de dinde, de bœuf, voire dans le lait, constitue un exemple. Des études permettent d’envisager, sur la base de résultats partiels, son effet protecteur contre le cancer du sein. Mais, la fonctionnalité peut s’avérer négative. Un très grand nombre de substances à potentiel toxique sont présentes dans l’alimentation humaine. Il y a celles induites par les procédés de transformation culinaire, dont l’exemple le plus connu concerne les viandes. Les hydrocarbures aromatiques polycycliques résultants des grillades sur charbon de bois ou du fumage sont susceptibles d’induire mutagenèse et carcinogenèse. Il y a les contaminants alimentaires, tels que certaines substances à action pharmacologique (œstrogènes, antibiotiques, sédatifs) dans les viandes, introduites lors de l’engraissement ou de l’élevage.
Autre exemple avec des agents de conservation comme les nitrites, utilisés traditionnellement dans les produits de salaison et responsables de la formation de nitrosamines cancérigènes.
L’impact du process
« Les aliments fonctionnels et les compléments alimentaires constituent un grand défi pour les industriels », a souligné Luc Méjean. Quelques principes fondamentaux sont à considérer. Un aliment peut avoir diverses propriétés fonctionnelles, en raison de sa composition ou du process subi. La fonctionnalité d’un aliment peut ne pas être la somme des fonctionnalités de ses ingrédients. Aujourd’hui, considérer l’aliment dans son ensemble est un impératif, surtout lorsque sa formulation devient de plus en plus complexe. Le consommateur n’ingère pas des substances actives isolées, mais un ensemble d’ingrédients ayant subi des mélanges et des traitements technologiques.
Les propriétés organoleptiques ou physicochimiques de la matrice alimentaire ne sont pas immuables et peuvent être modulées par des interactions. « La fonctionnalité est compliquée à mesurer, a insisté le scientifique. Elle peut être modifiée par le process de fabrication. On doit s’interroger sur l’influence de la lumière, de l’ionisation, de l’oxydation, des traitements thermiques ou de fractionnement. »