« La collecte du gibier s'organise »
LM : Y a-t-il émergence d’une filière nationale du gibier de chasse ?
Charlotte Dunoyer : C’est un travail de longue haleine. Il a d’abord fallu lever un verrou législatif. La vente est maintenant autorisée toute l’année, grâce à la loi sur le développement des territoires ruraux de février 2005. Mais, bon nombre de restaurateurs et de bouchers l’ignorent. Le gibier se cantonne encore à deux mois de présence sur le marché. Pour accroître sa notoriété, une marque a été présentée au Salon de la Chasse de Rambouillet en mars dernier : « Gibier de chasse — Chasseurs de France ». Elle sera en test pilote cet automne. La cible est la restauration, la boucherie artisanale. ...Pas la grande distribution : question de volumes et de régularité d’approvisionnement. On fournit la publicité sur le lieu de vente (des étiquettes, fiches recettes, affiches) et l’animation autour. Une documentation est en chantier, visant à faire la part du vrai et du faux, à rappeler la réglementation, les bonnes pratiques. Y figurent des questions/ réponses sur : « à qui s’adresser ? », « comment s’équiper pour du gibier en entier ? ». Par ailleurs, on continue à communiquer sur les qualités nutritionnelles du produit. Le gibier est une viande très maigre, plus adaptée à des jus de cuisson qu’à des sauces trop lourdes.
LM : Quelles sont les actions menées en amont ?
La FNC tente de convaincre les chasseurs, là où aucune filière n’est en place. Une brochure sur la valorisation de la venaison a été diffusée cet été à 50 000 exemplaires. Il y a trop de gibier. Cela provoque des dégâts à l’agriculture et pose le problème éthique du gaspillage. La fédération essaie de créer des liens entre l’amont et l’aval. Un appui est proposé à ceux qui veulent se lancer dans une petite industrie locale, à travers une expertise technique (vétérinaire, réglementaire), la recherche de fonds. Ce travail a démarré il y a trois ou quatre mois.
LM : Les centres de collecte et de traitement du gibier se développent-ils ?
J’ai noté la présence de trois fournisseurs de chambres froides au dernier salon de Rambouillet et ils ne se sont pas ennuyés ! C’est une preuve que les chambres de collecte, pour la mise en commun de gibier, prennent de l’essor. Les ateliers de traitement, qui peuvent être de tout petits abattoirs de taille artisanale, se développent aussi par endroits. Villette Viandes, à Château-Thierry (Aisne), est le numéro un du secteur. Son envergure est nationale, avec une activité tournée vers la viande française et étrangère. D’autres, comme Picardie Venaison, restent à 100 % Origine France. Le Gue’lier, près de Chartres, traite du gibier l’hiver, des brochettes de volaille l’été. D’un point de vue géographique, seul le Sud du pays reste sous-équipé. Mais globalement, la demande de gibier existe, comme le répètent sans cesse les opérateurs en aval. Des distributeurs comme Métro, des restaurateurs comme Flo sont très preneurs.