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Glyphosate... la Commission face à ses contradictions

La saga « glyphosate » n'est toujours pas finie. Cet herbicide controversé – plus connu sous son application « round-up » –, dont l'autorisation de commercialisation expire fin juin, fait ressortir de profondes divergences au sein des instances européennes.

Au cœur de toutes les discordes depuis près d'un an, le cas du glyphosate fait couler beaucoup d'encre en Europe. Cet herbicide, substance active présente dans la composition de plus de 750 produits de 90 fabricants, est actuellement le plus utilisé dans le secteur de l'agriculture. Au sein de l'Union européenne, l'autorisation du glyphosate court jusqu'au 30 juin 2016, et faute d'accord d'ici cette date, la commercialisation de cette substance sera interdite. Le temps presse donc, après que la Commission a ajourné à deux reprises, faute de majorité qualifiée des États membres, le vote destiné à renouveler la licence du glyphosate.

Circ et Efsa s'opposent

Cette situation s'explique par les incertitudes qui planent toujours quant au réel effet de cette substance sur la santé. À cet égard, les avis scientifiques divergent, ce qui ne fait qu'alimenter la polémique et nourrir les interrogations. D'un côté, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), en sa qualité d'agence de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) référente sur le cancer, se prononçait en mars 2015, sur l'effet « cancérogène probable » du glyphosate sur la santé humaine. De l'autre, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) concluait à l'inverse, quelques mois plus tard, en décembre 2015, en annonçant le caractère « cancérogène improbable » du glyphosate. Les deux agences continuent à s'opposer, ce qui devient cornélien pour la Commission européenne qui tente désespérément de trouver une majorité qualifiée au sein des États membres.

L'exécutif européen, qui penche pour un renouvellement de la substance active, se heurte à la forte résistance de certains États membres qui la considèrent comme un perturbateur endocrinien, France et Pays-Bas en tête, l'Allemagne refusant de prendre position pour le moment. Quant au Parlement européen, réuni en séance plénière le 13 avril 2016, il a appelé la Commission à renouveler l'autorisation du glyphosate, mais uniquement sous certaines conditions. Les députés européens se sont prononcés en faveur d'une nouvelle autorisation pour une durée de sept ans, au lieu des quinze années habituellement prévues, et pour un usage restreint aux « usages agricoles » de la substance.

Condamnée pour inaction par la CJUE

Il faut dire que la position de la Commission européenne ne permet pas d'apaiser les tensions. Récemment condamnée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) pour son inaction dans le dossier des perturbateurs endocriniens, la Commission semble agir en toute contradic-tion en se positionnant en faveur d'un renouvellement de l'autorisation. En effet, la CJUE a sanctionné, le 16 décembre 2015, l'institution européenne pour ne pas avoir adopté, à temps, les actes délégués sur la « spécification des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien ». Aussi, en se prononçant ouvertement en faveur cette fois du renouvellement de l'autorisation du glyphosate, alors même qu'elle se refuse à définir les critères scientifiques permettant d'encadrer les perturbateurs endocriniens, la Commission ne fait qu'ajouter du flou à une situation scientifique et politique déjà très complexe.

Le lundi 6 juin, l'exécutif européen a d'ailleurs essuyé un troisième échec. Alors que la Commission avait fait une nouvelle proposition en faveur d'une autorisation provisoire du glyphosate pour une durée de dix-huit mois seulement, afin d'attendre l'avis scientifique de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA), la majorité qualifiée a une fois de plus manqué.

Désormais, la constitution d'un comité d'appel, présidé par la Commission européenne, est attendue d'ici au 20 juin, faute de quoi et faute d'accord, le glyphosate deviendra une substance interdite à compter du 1er juillet 2016.

LE CABINET KELLER & HECKMAN

Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaires, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avocate-associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est chargée de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu'en contentieux, auprès des industries de l'agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l'Union européenne.

Rédaction Réussir

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