Etiquetage des allergènes : l’Afssa fait le point
L’AFSSA vient de rendre public un avis sollicité par la première saisine jamais déposée auprès d’elle par une association de consommateurs. Il concerne «les allergies alimentaires et l’étiquetage de précaution». L’agence en effet été interrogée le 1er avril 2005 par la CLCV, à laquelle s’étaient associées trois associations d’allergiques et d’intolérants (Afpral, Association française des polyallergiques, Afdiag). Il lui aura fallu près de quatre ans pour reconnaître que l’étiquetage de précaution n’a pas de cadre réglementaire et recommander au final aux acteurs (professionnels, gestionnaires du risque et associations) de se concerter pour qu’une liste restrictive de mentions soient désormais utilisées. Un tel étiquetage devrait dans tous les cas être justifié par une HACCP allergène.
«Les personnes souffrant d’allergies alimentaires ou d’intolérance ont de plus en plus de difficultés à interpréter les étiquetages des produits de l’industrie», rappelle Charles Pernin, spécialiste des questions agricoles et agroalimentaires à la CLCV. Car la difficulté des consommateurs reste bien de trouver des aliments qui conviennent à un régime d’éviction imposé par leur spécificité immunitaire (allergie) ou enzymatique (intolérance). «Si ce type d’étiquetage permet aux industriels de limiter les contentieux d’ordre juridique, il prend aussi le risque de placer une partie des consommateurs allergiques face à un choix difficile : (i) acheter des produits garantis sans allergènes obligatoirement plus onéreux car nécessitant une maîtrise du risque allergène complexe et coûteuse pour l’industriel ou (ii) consommer des produits de l’alimentation courante utilisant cet étiquetage de précaution sans avoir la possibilité d’évaluer avec précision le risque d’accident allergique lié à ces présences fortuites», note l’Afssa dans son introduction. Une étude montre ainsi que 42% des consommateurs américains allergiques à l’arachide n’en tiennent plus compte.
Responsabiliser les fournisseurs
Plusieurs éléments notés dans le rapport sont rassurants. Ainsi, selon l’Afssa, un des industriels auditionnés n’a pas recours à cet étiquetage de précaution et ne relève aucun problème particulier grâce à la responsabilisation de ses 400 fournisseurs et une relation contractuelle. De même, le réseau d’épidémio surveillance géré par l’Afssa n’a noté aucun cas d’anaphylaxie par allergène présent involontairement depuis l’entrée en vigueur de la directive européenne sur l’étiquetage des denrées préemballées de novembre 2005.
Les contaminations croisées semblent perçues comme un risque proche des risques bactériologiques mais sans que les scientifiques ne s’avancent en termes de seuils, contrairement aux spécialistes de l’hygiène alimentaire pour les principales espèces de pathogènes. Aujourd’hui, seul les seuils en gluten sont réglementés, principalement en raison de la maladie coeliaque (intolérance). L’Afssa note cependant que les industriels appliquent de plus en plus largement des HACCP allergènes. En pratique, le seuil de 10 ppm est généralement retenu par les grands groupes industriels. L’Ania a proposé de travailler sur des fourchettes de limites maximales de présence fortuites dont les bornes sont des suggestions de seuils. «Au delà de la réflexion sur les seuils d’allergènes dans les aliments, il faut souligner qu’une telle appréciation quantitative de risque permettrait notamment d’informer les consommateurs allergiques sur les risques objectifs qu’ils prennent à consommer des aliments disposant d’étiquetage de précaution, selon la connaissance qu’ils peuvent avoir des doses auxquelles ils peuvent réagir», estime l’Afssa.
La question des seuils réactogènes individuels les plus bas ne relève évidemment pas du domaine «grand publi» mais d’une prise en charge plus médicale et de recherches toujours en cours. La saisine visait donc aussi à éclaircir les allégations de type «sans» ou «naturellement sans». L’Afssa appelle à une clarification sur les produits réputés «sans» allergènes qui sont vendus beaucoup plus chers que leurs homologues grâce aux contrôles notamment. En absence de seuils réglementés, le risque est en effet que certains produits «grand public» étiquetés «susceptibles de contenir» sont plus «exempts» que certains produits étiquetés « sans».
On attend cette année un avis du CNA qui a lancé un groupe de travail sur les besoins des consommateurs allergiques et intolérantes et l’aboutissement des travaux de normalisations européens sur le dosage des allergènes. Au point de vue réglementaire, les produits non préemballés devraient également se voir appliquer l’obligation d’information sur la présence d’allergènes.