Danone se lance dans l'ultra-frais biologique
Depuis lundi, des packs de spécialité laitière « Les 2 vaches des fermiers du bio », illustrés de sympathiques ruminants, ont fait leur apparition chez 5 enseignes de la distribution. Derrière cette arrivée apparemment anodine se cachent en réalité les premiers pas de Danone dans les produits laitiers biologiques, une niche que le géant agroalimentaire espère décupler dans les années à venir. « Ce qui a fait tilt, c'est quand j'ai appris que 40 % du lait bio produit en France était déclassé », a expliqué hier Franck Riboud. Le développement de cette niche a aussi une part dans l'engouement du pdg de Danone, dont l'ambition est de faire passer la part du bio de 1 à 10 % dans l'ultra-frais en GMS, soit de 30 à 300 M Eur en France.
Assez peu fourni en produits issus de l'agriculture biologique, le linéaire des produits laitiers frais se contentait alors des produits à marque « Vrai » (Triballat Noyal) depuis 1995, à marque Bionat (Eurial Poitouraine) lancée il y a un an, sans compter les séries produites par de petites laiteries. Dorénavant, c'est un acteur de poids mondial qui consacre une partie de son site normand de Molay-Littry à la fabrication de 8 références de spécialités laitières, nature ou aux fruits, avec des ingrédients bio.
Contrairement aux habitudes de Danone, le budget de communication se veut modeste, et les produits « Les 2 vaches des fermiers du bio » ne devraient pas apparaître à la télévision ou dans les journaux, profitant plutôt d'un emballage humoristique avec des vignettes de bd illustrées par 2 vaches et un graphisme enfantin. Ces recettes ont déjà fait leurs preuves chez Stonyfield, l'actuel n° 1 des produits laitiers frais « organic » aux Etats-Unis (équivalent du bio).
Cette entreprise précurseur outre-atlantique a d'ailleurs été l'objet d'une prise de participation de Danone ces dernières années (40 puis 80 %) avant que les deux partenaires n'annoncent cet été la création d'une filiale européenne. Nommée Stonyfield Europe, elle a pris en juin une participation de 37 % dans le capital de la société irlandaise Glenisk, Danone voulant contribuer au développement des produits laitiers frais bio à grande échelle. « Par effet de volume, nous allons rendre certains produits plus accessibles », a expliqué M. Riboud, espérant par la même occasion enclencher un cercle vertueux, et pourquoi pas développer d'autres produits à l'image de la gamme très étoffée de Stonyfield aux Etats-Unis. Présent hier à la conférence de lancement, le défenseur du bio et président de la section agriculture biologique de la CNLC (Commission nationale des labels et certifications) Philippe Desbrosses a bien accueilli l'arrivée d'un tel acteur, qui devrait contribuer au développement de ce mode de production.
Un surcoût de 15 %
Pour le moment, les 8 références proposées en France ont un surcoût d'environ 15 % par rapport à des yaourts classiques, un positionnement prix situé dans le bas de la fourchette. Mûrement réfléchi, le nom de ces spécialités laitières
(« Les 2 vaches des fermiers du bio ») et les visuels sont destinés à rappeler le lien avec la terre, particulièrement fort dans le domaine du bio. Ils ont été choisis au détriment d'un « Stonyfield Europe » peu porteur pour les consommateurs, qui devront avoir l'œil exercé pour repérer le très discret logo Danone, uniquement présent à l'arrière des emballages. Après l'épisode du vrai faux yaourt biologique nommé Bio (remplacé par Activia), Danone fait de la France son « camp de base pour le succès de ces produits laitiers », en espérant profiter des 10,8 % de croissance annuelle du bio, contre 2,1 % pour le standard. De quoi poursuivre la réussite économique du groupe, qui vient de connaître le meilleur trimestre de son histoire.