Courrier
Dans un « ils ont dit » publié le 26 janvier dernier, nous avons cité Michel Leblay, le président de la FRSEA Auvergne. A la suite de cet article, nous avons reçu ce courrier de Philippe Desbrosses, agriculteur et soutien de Nicolas Hulot, que Michel Leblay mettait en cause. Nous en publions l’intégralité, en vertu du droit de réponse.
“ Lorsque M. Leblay exprime son opinion en tant que Président de la FRSEA AUVERGNE, sur le Pacte Ecologique de Nicolas Hulot, il est dans son rôle légitime de représentant d’un organisme professionnel. Il est aussi dans son droit de citoyen à critiquer des idées contraires à ses objectifs. J’en prends acte et jusque-là je respecte les points de vue contraires au mien.
Mais je dénonce l’action calomnieuse, lorsqu’il se livre à des attaques ciblées contre ma personne en essayant de me discréditer au motif que je serais un « écolo-rétro » affilié à une secte, ayant un business à défendre des crèmes et produits naturels des Laboratoires Weleda dont je serais actionnaires... dixit M. Leblay, c’est-à-dire que j’y ai des intérêts plus ou moins avouables...
1. Je n’appartiens pas au mouvement d’Agriculture Biodynamique considéré comme sectaire par M. Leblay. Je précise néanmoins que cette méthode de production est parfaitement respectueuse de la santé de la terre et pratiquée, depuis près d’un siècle, dans le monde entier par des gens respectables, des domaines et des marques alimentaires prestigieuses. C’est le cas en France avec la plupart des grands vignobles les plus réputés. M. Leblay devrait mieux s’informer.
2. Je ne suis pas et n’ai jamais été actionnaires des Laboratoires Weleda, société également respectable qui, depuis plus de 80 ans, a le mérite de s’inscrire dans une démarche de qualité et, est restée une entreprise à dimension humaine dont les cosmétiques sont unanimement appréciés en Europe.
Maintenant sur le fond, il est évident que M. Leblay n’a pas lu le Pacte Ecologique lorsqu’il affirme que l’équipe de Nicolas Hulot s’en prend aux paysans. C’est tout le contraire que nous écrivons pages 97, 98 et 99, dans le chapitre sur l’agriculture, nous dénonçons clairement la politique agricole dont les agriculteurs sont les premières victimes des tâches imposées par les industriels. Nous expliquons qu’ils ont perdu tout contrôle sur la transformation de leurs produits.
Enfin nous dénonçons, ce qui est indécent face à la misère des Resto du cœur et à celle des petits paysans dans des campagnes exsangues, la répartition scandaleusement inéquitable des subventions publiques dont 80 % vont à 20 % seulement des bénéficiaires.
Nous expliquons page 97, comment l’agriculture productiviste promue par les industriels et les instituts de recherche et de développement se révèle aujourd’hui à la fois destructrice pour l’environnement et génératrice d’exclusion pour les hommes. Elle vit sur un modèle -l’artificialisation à outrance des éco-agrosystèmes et le camouflage des coûts réels sous le flot des subventions qui ne garantit plus la sécurité alimentaire des milliards d’habitants sur la planète.
Enfin, il faut cesser cette hypocrisie d’invoquer « la faim dans le monde » pour justifier les méthodes polluantes et dégradantes pour la terre, quand on sait que les mêmes promoteurs de ce système intensif sont les premiers à demander les interventions de l’Etat pour autoriser la destruction de leurs excédents agricoles afin d’éviter que les cours des marchés ne s’effondrent, sans parler des primes aux milliers d’hectares gelés pour les mêmes raisons.”
Philippe Desbrosses est agriculteur, Docteur en Sciences de l’Environnement, auteur de nombreux livres, dont «Nous Redeviendrons Paysans» préfacé par l’Abbé Pierre et de «Terre d’Avenir» préfacé par Edgar Morin.